Cicéron, en tant que maître d'éloquence, est l'un des auteurs classiques les plus copiés au Moyen Âge. Figure tutélaire de la rhétorique, il est aussi un modèle récurrent des pratiques vertueuses, christianisé par les Pères de l'Église. À ces influences, l'historiographie consacrée à l'Italie communale a ajouté une dimension politique, en notant, tout particulièrement dans le cadre florentin, l'application des normes cicéroniennes aux définitions du juste gouvernement et du bon citoyen. Or cette dette médiévale n'est pas datée avec précision par les historiens : à quand faire remonter les prémices de l'« humanisme civique » ? Ce livre vise à estimer le rôle formateur et légitimateur attribué à Cicéron quant aux normes civiques communales. Par le biais de l'auteur classique, il interroge l'unité et les spécificités des idéaux politiques de cet espace institutionnel en mobilisant un large corpus : sources normatives, florilèges, dictamina, traités de regimine, traductions invitent à reconsidérer le regard « républicain » qu'aurait porté le lecteur médiéval sur ce modèle antique.
Ce livre aborde l'art funéraire du XIIIe siècle par un biais original. Il s'intéresse à la manière dont les Frères Prêcheurs et Mineurs ont traité les sépultures de papes et de cardinaux dans leur discours, à la fois littéraire et monumental, entre 1250 et 1304. L'analyse des tombes de prélats situées dans des églises mendiantes, réparties entre l'Italie et la France, révèle une intervention des frères dans les choix d'emplacement, de forme et d'iconographie. Il ressort ainsi de l'enquête que les Frères Prêcheurs ont eu une politique de leur espace davantage planifiée que les Frères Mineurs, puisqu'ils n'acceptèrent dans le choeur de leurs églises que les sépultures de prélats appartenant à l'ordre, surmontées d'une plate-tombe. De leur côté, les Frères Mineurs ont construit un discours original sur leur rôle dans l'accompagnement des mourants, à la fois dans l'iconographie et dans la littérature homilétique. Enfin, ce livre accorde une place importante aux procédés mis en oeuvre par les mendiants pour « créer » des saints parmi les prélats qui étaient issus de l'ordre ou qui en étaient des bienfaiteurs.
La commune marseillaise au XIVe siècle est marquée par la domination angevine de Naples, qui n'étouffe cependant pas la vitalité politique urbaine, dont témoigne la dimension scripturale de l'administration municipale. Le gouvernement quotidien a en effet produit une abondante documentation jusqu'ici peu étudiée pour elle-même : les délibérations du conseil de ville, dans lesquelles se dessinent les jeux de pouvoir traversant la cité portuaire. Les années 1348-1385 sont marquées à Marseille par une situation de crise prolongée, notamment par la durable déstabilisation du pouvoir souverain. Dans ce contexte, l'assemblée municipale s'affirme comme le lieu du gouvernement de la ville. Alors que s'effacent les officiers royaux, le conseil de ville s'approprie une part grandissante d'autonomie et consolide le statut marseillais d'exception dans le comté de Provence. Les pratiques de l'assemblée - délibérations, serments, désignation de citoyens chargés de mettre en oeuvre les ordonnances adoptées - permettent à de nombreux habitants de participer à l'activité de l'assemblée urbaine, sous la direction d'une élite municipale qui s'entoure de notaires et de praticiens du droit. La légitimité communale s'appuie sur des outils scripturaux, depuis les statuts de la ville jusqu'aux écrits les plus quotidiens, dont la circulation définit un régime de normativité spécifique. L'enregistrement des séances s'avère l'instrument décisif de la construction de l'autorité par l'écrit : autour des registres délibératifs gravitent les multiples pièces administratives et juridiques qui assurent l'institutionnalisation et l'autonomie du gouvernement de la ville.
Ce quatrième et dernier volume du programme L'héritage byzantin en Italie (VIIIe-XIIe siècle), qui cherchait à analyser et à comparer l'évolution des régions autrefois soumises à l'autorité byzantine, de la Vénétie à la Sicile et à la Sardaigne en passant par Ravenne, Rome, Naples, le Salento et la Calabre, a pour thème des realia. On s'est intéressé aux originalités touchant à l'occupation du sol, aux formes de la grande propriété, aux contrats agraires et aux platee (listes de dépendants), enfin à la production et au commerce. La Sicile (sous les dominations byzantine et islamique) et la Sardaigne judicale (souvent négligée) sont bien représentées, à côté des diverses régions continentales ayant dépendu de l'Exarchat. Si, comme on s'y attendait, les évolutions sont dissemblables, les conclusions de Chris Wickham montrent la force de la tradition byzantine à propos de la grande propriété et du commerce ; l'héritage byzantin n'est pas uniforme, mais, même dans ces domaines éloignés de l'idéologie, il a laissé des traces durables.
Connu depuis longtemps, l'exceptionnel complexe thermal de Cefalà, qui met en valeur une source chaude naturelle située à 30 km au sud de Palerme, n'avait jamais fait jusqu'à présent l'objet d'une étude systématique et interdisciplinaire qui exploite en particulier les données archéologiques recueillies lors des fouilles menées dans les années 1990 et 2000. Les résultats de la recherche menée sous l'égide de l'École française de Rome et en collaboration avec la Surintendance de Palerme à partir de 2003 ont permis de préciser la chronologie des bains, dont les origines oscillaient jusqu'ici entre Antiquité et époque normande, et d'éclairer pour la première fois leur articulation initiale avec le site au sein duquel ils se trouvaient. Construit à partir du Xe siècle sous la dynastie régionale kalbide dans le contexte de la Sicile fatimide, monumentalisé par la dynastie des Hauteville au milieu du XIIe siècle, le complexe a connu une utilisation et une fréquentation ininterrompue et en constante évolution jusqu'au XXe siècle, avant d'être étudié et protégé. Ses transformations reflètent celles qu'a connues la société sicilienne au cours du Moyen Âge et notamment l'effacement progressif du contexte islamique initial, puis la féodalisation tardo-médiévale et enfin la redécouverte du complexe par les érudits de l'époque moderne. Cet ouvrage synthétise nos connaissances actuelles sur ce témoin des origines islamiques d'une partie du patrimoine thermal, mais aussi architectural et plus largement culturel, sicilien et éclaire ainsi d'une lumière nouvelle l'histoire du Palermitain médiéval, mais aussi celle du thermalisme.
Dans le cadre du projet ANR Europange consacré aux « Processus de rassemblements politiques : l'exemple de l'Europe angevine (XIIIe-XVe siècles) », le colloque qui s'est tenu à Angers en novembre 2015 s'est intéressé à la culture des officiers (centraux comme locaux) et de l'entourage des princes dans les territoires angevins, à leurs parcours universitaires et à leur formation intellectuelle au sens large. Différents thèmes ont pu être envisagés : les cursus universitaires (universités et facultés fréquentées, grades...), les apprentissages pratiques et techniques, notamment le rapport à l'écrit et aux comptabilités, les livres et les bibliothèques possédés par les officiers, leurs productions intellectuelles (juridiques, scientifiques, littéraires...). Au-delà des différences ou des similitudes qui ont pu être mises en avant entre les différents territoires angevins, ces journées, à travers des trajectoires de vie concrètes, ont permis d'identifier des carrières types et l'existence, parfois, d'un véritable déroulement de carrière s'apparentant à un cursus honorum. Outre le fait d'appréhender les composantes techniques et pragmatiques de l'apprentissage des officiers, les différentes interventions ont également dégagé des dynamiques mettant en lumière l'existence d'une culture administrative et/ou politique. Le présent ouvrage rend compte de ces échanges fructueux.
Cet ouvrage est fondé sur la constitution d'une série iconographique de 230 scènes représentant la Nativité du Christ, peintes à fresque et sur retable dans les régions centrales de la péninsule italienne entre 1250 et 1450. Il montre que le principal moteur de transformation de l'iconographie de cette scène narrative réside dans le motif de l'adoration, la représentation d'une ou plusieurs figures agenouillées priant et adorant l'Enfant nouveau-né. L'enquête sur l'apparition et le développement de ce motif, dès le début du Trecento, permet de réviser la genèse de l'Adoration des bergers et de l'Adoration de l'Enfant, d'élucider le rapport de la Nativité à l'Adoration des mages ainsi qu'à la Nativité de Marie, et de préciser les apports de la peinture hagiographique, de saint François d'Assise et de sainte Brigitte de Suède notamment, aux principales transformations de la scène. L'ouvrage propose une histoire iconographique de la Nativité du Christ où le nombre sans cesse croissant d'adoratrices et d'adorateurs dans la scène (Marie, Joseph, les anges, les bergers, l'âne et le boeuf, éventuellement les commanditaires) se présente comme des intercesseurs de statut variable, des relais dans l'image pour la prière des fidèles devant elle. Ces scènes, dont l'iconographie est progressivement habitée par les gestes de la dévotion, s'avèrent des sources visuelles aussi complexes que riches pour la recherche historique. En partant du cas Nativité/adoration dans la peinture italienne entre XIIIe et XVe siècles, on accède plus largement à tout un pan des évolutions spirituelles, esthétiques et sociales dans le rapport dévotionnel aux images.
Dans l'Occident médiéval, à partir du XIIe siècle, la question des biens mal acquis rencontre celle de la restitution, cet acte par lequel le bon chrétien s'engage à rendre les richesses acquises illicitement pour être en accord avec l'enseignement de l'Église et avec sa conscience. Les male ablata ont souvent pour origine - mais non exclusivement - des relations de crédit abusives, usuraires, que la restitution permet précisément de réparer en indemnisant, directement ou indirectement, les débiteurs lésés. Du XIIe au XVe siècle, des sources variées documentent ce mouvement de restitutio male ablatorum, depuis les dispositions pontificales, les questions théologiques et les commentaires des canonistes jusqu'aux testaments et donations inter vivos, en passant par des promesses de restitution ou des actes judiciaires. Pour interroger cette documentation, il importe avant tout de se dégager d'un a priori historiographique très répandu qui en réduit la portée à une simple moralisation hypocrite, pour satisfaire l'Église, des pratiques économiques des marchands médiévaux. Les textes réunis dans ce volume s'appuient sur des dossiers documentaires inédits et apportent une première réponse aux questions historiques posées par la restitution des biens mal acquis : quels en furent les acteurs, les bénéficiaires et les intermédiaires, quelles en furent les modalités, la chronologie et la place dans les sociétés médiévales ?
This book presents the proceedings of the international conference "The Middle Ages in the Modern World," held in Rome November 21-24, 2018. Attended by more than a hundred participants of different ages, educational backgrounds, and places of origin, the conference constituted a landmark in the study of medievalism: the historical discipline, now in full bloom, that investigates the ways in which the thousand-year period between 500 and 1500 was, and continues to be, presented, reconstructed, and imagined in successive eras. The book opens with a substantial bibliography drawn from all of its components, followed by the seven keynote lectures and ninety-three shorter texts - abstracts of the individual conference papers - organized along eight thematic pathways, which together provide a vivid image of the current state of the field.
Ce volume est l'aboutissement d'un itinéraire de recherche collective de plusieurs années regroupant deschercheurs français et italiens. Issu d'un programme de l'EFR intitulé « Statuts, écritures et pratiques sociales dans les sociétés de la Méditerranée occidentale (XIIe-XVe siècle) » (2012-2016), il rassemble les papiers de synthèse des cinq colloques qui ont été organisés dans la cadre de ce programme accompagnés d'une introduction et d'une conclusion. Les « corpus statutaires » définis comme « tout type de texte qui se présente comme une forme écrite et stabilisée du droit local, édictée par une autorité publique » y sont étudiés de leur confection à leur usage social dans un souci comparatiste entre deux aires géographiques et traditions historiographiques distinctes : l'Italie communale et le Midi de la France.Après l'analyse de leur formematérielle, du vocabulaire et des langues utilisées, l'ouvrage s'intéresse aux « acteurs » de la norme, à la rhétorique et à l'écriture puis replace la matière statutaire dans son paysage documentaire pour mesurer les circulations documentaires en analysant les points de contact entre les statuts et les autres documents produits par les autorités communales, par des institutions de la commune et par une autorité supérieure, avant d'étudier l'organisation interne des statuts, le plan adopté et les principaux thèmes abordés pour terminer sur l'usage des statuts dans les autres formes documentaires. L'historiographie italienne a fait des statuts communaux des monuments. Nous avons tenté d'en refaire ce qu'ils étaient, c'est-à-dire des documents, objets matériels produits en contexte par des hommes de terrain pour vivre en commun et créer du lien social.
In the thirteenth century, mendicant orders introduced new ways of religious life that engaged the laity through preaching and conversion. Moreover, they founded new movements for religious women dedicated to prayer and contemplation, such as the Dominican nuns and the Poor Clares. In their churches, both friars and nuns were separated from the laity, either in choir precincts situated behind architectural screens, or in upper galleries raised above ground level. Before the widespread removal of these furnishings, therefore, medieval and early modern mendicant church interiors did not resemble the unified spaces we encounter today. This volume presents a series of European case studies which use textual and material evidence to reconstruct and analyze the internal divisions of churches between the thirteenth and the sixteenth century. Thus, the authors provide a broad understanding of the variety, function, and meaning of the internal divisions that once conditioned the spiritual experience, function and meaning of sacred space for the laity as well as for the religious community.
Describing the Holy Roman Empire after 1250 as a hopeless dream or an empty formula only Roman in name, historians have long minimized the impact of the imperial presence in late-medieval Italy. The nationalist historiography, on which we still largely depend, presented the Empire as alien to the very essence of humanism and modernity. Associating humanism with republicanism, scholars silently suggested that the belief in the peace-bringing emperor faded away as the Renaissance unfolded. No real humanist, so it was believed, could genuinely support the medieval construct that was the Holy Roman Empire. Only recently has this historiographical framework really been challenged. The present volume builds further on the thesis that humanism was perfectly compatible with imperialist political ideals. It aims to bring together new perspectives on empire and emperors in Italy and to highlight the continuing importance of the imperial ideal throughout the fourteenth and fifteenth century. It focuses on imperial discourses in the writings of Italian historians, humanists, poets, jurists and notaries. The imitation of Roman emperors is both a sign of the Renaissance and a central aspect in medieval political thought. It may, therefore, not surprise that the descent of the "king of the Romans" into Italy attracted the attention of Italians with humanist tastes. The name of empire aroused high expectations. Orations, histories, treatises, and letters show that many still generally accepted the legitimacy of the empire and considered the contemporary Holy Roman Emperor as the lawful leader of the Christian world.
I decenni che precedettero la terribile epidemia di "Peste Nera" del 1348 in Europa sono stati a lungo presentati univocamente come un periodo di gravi difficoltà, dovute all'instabilità politica e, soprattutto, all'eccessiva crescita della popolazione rispetto alle risorse agricole, il cui aumento era frenato dalle scarse tecnologie disponibili. Questa ricostruzione è stata oggetto negli ultimi anni di una profonda revisione, con una rinnovata attenzione allo sviluppo della commercializzazione, anche a lungo raggio, dei prodotti alimentari e agli investimenti nelle campagne, rivelatisi tutt'altro che ininfluenti. Rispetto alle grandi panoramiche finora dominanti nel dibattito, questo volume presenta una serrata analisi di una realtà regionale - la Lombardia dalla fine del XIII secolo alla metà del XIV - considerata sotto molteplici punti di vista, dalla storia rurale a quella delle manifatture, dei prestiti e dei commerci, dagli aspetti fiscali e monetari a quelli militari e dell'assistenza. Ne esce un ritratto articolato, che senza negare gli elementi di difficoltà, mette in luce la sostanziale "tenuta" del sistema produttivo e sociale lombardo prima delle grandi epidemie del 1348 e del 1361.
Cet ouvrage collectif est le résultat d'un programme de recherche de quatre années consacré au siège épiscopal de Mariana (Lucciana, Haute-Corse). Après une présentation de la colonie romaine fondée au début du Ier siècle avant notre ère, sont exposés les résultats de l'étude archéologique de cinq édifices de culte chrétien (la basilique paléochrétienne intra-muros et son baptistère, la basilique suburbaine, la cathédrale romane ainsi que l'église San Parteo), des résidences épiscopales successives ainsi que du territoire de cet ancien évêché. Bien que l'agglomération abandonnée de Mariana ait fait l'objet de deux programmes de recherche par le passé (1958-1967 et 1998-2007), de nombreuses questions restaient posées. La relecture systématique des vestiges dégagés anciennement, l'étude des constructions conservées en élévation, le réexamen des mobiliers archéologiques et les datations par le radiocarbone permettent aujourd'hui de répondre à une partie de ces interrogations. On peut ainsi proposer de nouvelles interprétations et une chronologie plus précise de ce centre du pouvoir d'un intérêt majeur pour l'histoire de la Corse. Au-delà, une mise en perspective de cet ensemble au destin si singulier amène aussi à porter un autre regard sur l'ancienne colonie de Mariana et sur sa place dans le contexte de la Méditerranée occidentale entre le Ve et le XVe siècle.
Les hommes du Moyen Âge, pour racheter leurs péchés, multipliaient les dons aux monastères qui accumulèrent d'importants patrimoines. Le livre oppose deux monastères vénitiens, l'un rural situé sur la frontière lagunaire, La Trinité de Brondolo, l'autre, urbain, placé au coeur du pouvoir politique, San Giorgio Maggiore. San Giorgio a multiplié les donations, La Trinité a entrepris une audacieuse politique de mise en valeur de la Lagune et pour obtenir le produit des dîmes, s'opposa à la noblesse campagnarde et à la paysannerie. Sous le poids des procès, le monastère s'endetta et le pape en confia la gestion aux Cisterciens, jusqu'à sa destruction en 1380. Le monastère de San Giorgio subit aussi la crise au XIVe siècle, le mouvement de réforme rassembla les monastères bénédictins dans des congrégations, sous le patronage de l'abbaye de saint Benoit et sous l'autorité du pape. La Congrégation instituait la solidarité financière entre ses membres sollicités de contribuer aux finances pontificales et aux guerres contre les Turcs. Le monastère a alors recouru aux instruments de crédit mis au point dans une république marchande. Ayant appelé les plus grands architectes, Palladio et Longhena, pour reconstruire ses bâtiments et les embellir, à la chute de la République il disposait d'un patrimoine immobilier considérable.
L'extension progressive de l'autorité pontificale en Dalmatie a profité de la longue histoire romaine de cette ancienne province impériale. Les sources révèlent d'abord les ambitions, les contradictions et les échecs de la papauté dans cette région perçue comme une porte d'entrée vers l'espace byzantin, les Balkans et l'Europe centrale. Ce n'est qu'aux Xe-XIe siècles, au moment où se redéfinissent les sphères d'influence dans l'Adriatique, qu'apparaissent les différents volets d'une diplomatie cohérente (légende d'apostolicité attribuant l'évangélisation de la Dalmatie à un disciple de saint Pierre ; obligation de la liturgie latine ; diffusion de l'art roman ; ambassades et correspondances apostoliques ; conciles sous l'autorité de la métropole de Split ; expansion bénédictine sous l'influence de l'abbaye du Mont-Cassin ; collaboration avec la dynastie croate). Le serment de fidélité du roi croate Zvonimir au pape Grégoire VII en 1075, aux portes de l'antique Salone, illustre un volet régional de la réforme « grégorienne » qui renforça la primauté pontificale et le royaume dalmato-croate. Mais il nous invite surtout à décentrer le regard, à varier les échelles, du local à l'universel, pour mieux saisir la nature politique de cette réforme globale qui inaugure un nouveau rapport au monde.
Comment saisir l'activité intellectuelle à l'époque moderne ? Comment faire dialoguer des traditions historiographiques - la française et l'italienne - qui, pour être proches au plan géographique, n'en mobilisent pas moins des questionnaires, des méthodes, des objets divergents ? En quoi un travail de ce type peut-il contribuer à l'analyse du travail intellectuel contemporain ? Le volume qu'on présente ici offre les résultats d'un programme de recherche qui a accueilli pendant cinq ans, à l'École française de Rome, des chercheurs italiens et français engagés dans une analyse comparative susceptible de contribuer à l'éclairage de ces questions. Trois sites, Naples, Rome, Florence, ont alimenté la comparaison sur la base d'un questionnaire commun dont les résultats sont proposés dans les trois textes de synthèse correspondant à chacune des villes. Des études locales et plus circonstanciées sont venues enrichir ces textes de synthèse, ainsi que des recherches engageant conjointement les trois villes. L'adjonction d'annexes et d'une large bibliographie offre des outils de travail susceptibles d'approfondir la recherche et de prolonger la réflexion.
Par la multiplication des déplacements de la papauté dans la seconde moitié du XIIIe siècle et par l'obligation faite à ses hôtes de lui bâtir de nouvelles résidences, cette période représente un siècle d'or pour les constructions civiles des pontifes. Le présent ouvrage est fondé sur l'étude monographique des onze résidences principales de la papauté (palais et châteaux situés à Rome, dans le Latium et en Ombrie), depuis les plus célèbres, comme les palais du Latran et du Vatican, aux plus méconnus, tel le château de Soriano nel Cimino, et s'appuie sur des textes multiples en partie inédits. Cette double approche permet d'aborder tous les aspects de cette riche floraison dans une double perspective, celle de l'histoire de l'architecture, mais aussi celle de l'histoire tout court, car l'étude des résidences conduit à aborder l'histoire de la cour pontificale, de la curie, de la papauté elle-même. Après l'étude des monuments sont traitées la mise en oeuvre des bâtiments, l'étude des diverses parties de la résidence au service de la personne du pape et de l'administration pontificale (depuis les grandes salles jusqu'à la chambre et à la chapelle du pape), la typologie des palais et châteaux et leur insertion dans leur tissu urbain respectif. Enfin est envisagé l'ensemble de l'activité architecturale des pontifes, qui apparaît comme l'expression de l'ambition universelle de l'Église du XIIIe siècle. Pourtant, à cause de l'instabilité des séjours, de la brève durée de nombreux pontificats et des moyens encore limités de la papauté et des communes qui la recevaient, le résultat présente un aspect un peu anarchique, si on le compare au siècle suivant où une grande partie des moyens sera concentrée dans l'élaboration d'un programme cohérent, et l'ambition des pontifes se conclut sur un échec, avec l'attentat d'Anagni. Mais c'est ce qui fait tout l'intérêt de cette période, qu'on peut voir comme un temps d'expérience, de recherche, de tâtonnement, avant les temps de la papauté et du palais d'Avignon.
Prolongement d'une journée d'études qui s'est tenue à l'École française de Rome les 26 et 27 octobre 2015, ce volume est le premier recueil d'études consacré à l'oeuvre de Florus de Lyon (floruit ca. 825-855). Ses douze compilations sur les Épîtres de Paul, éditées sous le nom de « Collection des Douze Pères » (Collectio ex dictis XII Patrum), avaient été découvertes au milieu du XVIIe siècle, mais n'ont été éditées pour la première fois que récemment. Ce corpus d'un gros millier d'extraits, qui puise à plus de deux cents textes patristiques et canoniques, nous conserve l'image d'une bibliothèque célèbre en son temps, celle du chapitre cathédral de Lyon, au prisme de son plus notable acteur, le diacre Florus. Pour beaucoup des oeuvres tardo-antiques qui y sont citées, Florus offre ainsi le plus ancien témoignage dont les philologues puissent disposer. En réunissant des spécialistes de presque tous les auteurs impliqués dans ce corpus aux multiples facettes, ce volume représente la première tentative d'étudier les méthodes et les choix du compilateur, d'analyser et de comparer les manuscrits qu'il a lui-même utilisés, d'entrer enfin dans cette bibliothèque carolingienne.