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Romans & Nouvelles
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Atteint du syndrome d'Asperger, l'homme qui se livre ici aime la vérité, la transparence, le scrabble, la logique, les catastrophes aériennes et Sophie Sylvestre, une camarade de lycée jamais revue depuis trente ans. Farouche ennemi des compromis dont s'accommode la socialité ordinaire, il souffre, aux funérailles de sa grand-mère, d'entendre l'officiante exagérer les vertus de la défunte. Parallèlement, il rêve de vivre avec Sophie Sylvestre un amour sans nuages ni faux-semblants, et d'écrire un Traité de criminologie domestique. Par chance, il aime aussi la solitude.
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Gaston Ferdière est ce psychiatre inconnu qui a reçu et soigné Antonin Artaud à l'hôpital de Rodez entre 1943 et 1946. La mémoire collective a gardé de lui l'image tremblée d'un aliéniste incapable de distinguer la littérature de la graphomanie, d'un père-la-morale acharné à ramener Artaud au bercail de la raison ordinaire. Autant de contresens.
Homme sensible et cultivé, praticien généreux et compétent, Ferdière n'a guère péché que par manque de souffle poétique et de foi en luimême.
Poète mort sans oeuvre et psychiatre injustement désavoué, il nous laisse l'énigme d'une vie ratée avec tant d'application qu'elle mérite, à coup sûr, le détour.
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Schizogramme : n.m., de schizein, couper, et graphein, écrire. Néologisme créé en 2022 par l'auteur, désignant un écrit sur la schizophrénie. En l'occurrence, la vingtaine de schizogrammes composant ce recueil évoquent ici une tranche de vie, là un destin, ailleurs la folie douce de l'institution psychiatrique. Vingt occasions de s'émerveiller face aux trouvailles du délire, de s'émouvoir des détresses qu'organise la psychose, de pointer l'étonnante contagiosité de la folie.
Ces vignettes sont à lire comme des fictions vraies. Ces évocations d'hurluberlus sont aussi l'occasion de contrecarrer la peur du fou. A la construction médiatique du " schizophrène dangereux " s'opposent ici des figures de malades vulnérables, saugrenus, poétiques. -
L'intrigue de ce livre commence le 1er janvier 1981 et s'achève le 31 décembre de la même année. Avec quarante ans de recul, le narrateur se remémore sa vie d'étudiant cette année-là, ses relations amoureuses hésitant entre des figures contrastées de la féminité - dont celle qui lui fit vivre la douche écossaise d'un grand amour - mais aussi les hésitations du pays, autour de l'élection de François Mitterrand, entre les utopies de la gauche et le spectre du totalitarisme communiste brandi par la droite.
Le narrateur évoque également ses lectures datant de cette époque : la mythologie gréco-latine, qu'une amante d'un soir l'invite à mieux connaître ; et les « cent plus beaux textes écrits en français », dont un libraire carburant au Pouilly-Fumé s'attache, soir après soir, à dresser l'impossible liste.
Entremêlant une succession de plongées dans la mémoire du narrateur et de relecture des grands mythes antiques, le récit dessine par petites touches son thème profond : la construction du récit historique, sanctuaire de papier constitué d'un bric-àbrac de légendes et de souvenirs, tous plus fallacieux les uns que les autres. Il se termine dans le vertige identitaire qui en découle et que tentent de fixer nos fragiles constructions biographiques : qui sommesnous ? Que savons-nous de nous, en dehors du récit par lequel nous nous racontons ? Nous est-il possible de nous rencontrer hors des illusions du langage ?
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La lumière, l'encre et l'usure du mobilier
Emmanuel Venet
- Gallimard
- Blanche
- 12 Janvier 2023
- 9782072962196
Au fil d'une mémoire capricieuse, Emmanuel Venet explore le capharnaüm dont nos vies sont faites - chair, paroles, histoire, culture. Avec humour, l'auteur évoque son enfance lyonnaise et son éducation à l'ombre de parents pénétrés de religion catholique et de valeurs conservatrices, son parcours spirituel, ses désillusions amoureuses, ses affinités littéraires, ou encore son expérience de psychiatre.Si les vingt-six chapitres de cet abécédaire se présentent comme des nouvelles autonomes, de A comme «auberge» à Z comme «Zweig», leur suite dessine - dans une langue splendide frayant entre récit intime, réflexion, anecdotes savoureuses et poésie - un itinéraire, et un monde intérieur fait de pièces et de morceaux, de rencontres et de surprises, de lieux communs et d'événements singuliers.
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« Esther X. a décidé de se nourrir de sperme et de sang. Dans les toilettes d'un bar, elle trouve plusieurs hommes très heureux de la sustenter, jusqu'à ce qu'elle en morde un très profondément à l'oreille. Sans le savoir, il aura frôlé le pire. » « Désespéré par l'inconduite de sa petite amie, Loïc Y. absorbe cinquante comprimés de somnifère. On le sauve. Cent comprimés. On le ranime. Deux cents comprimés, on le ressuscite. Quand ça veut pas, ça veut pas. » Clin d'oeil appuyé aux Nouvelles en trois lignes de Félix Fénéon, ce recueil d'observations saisies sur le vif ouvre une fenêtre sur des mondes intérieurs chamboulés par la souffrance ou la maladie psychique. On n'y trouvera pas la pierre de folie, mais la matière de destins ici tragiques, là cocasses, partout émouvants.
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Il y a vingt ans jour pour jour qu'ils forment un couple.
Vingt ans que leur lien résiste à ce qui érode, sépare et altère les amants du premier soir.
Pour célébrer l'anniversaire de cette énigme, ils ont choisi le Negresco, haut lieu de leur imaginaire intime.
Là, derrière les volets entre-clos d'une chambre autrement plus cossue que celle de leurs commencements, ils viennent de faire l'amour ; et maintenant, sous un rai de soleil où dansent des poussières, chacun s'abandonne à sa rêverie.
Autant dire à la nostalgie, au réveil d'émois secrets, à la révision de son histoire et aux pensées inavouables - ce noyau d'infidélité contre et par lequel ils ont scellé, vingt ans plus tôt, un pacte amoureux dont il vaut mieux ne savoir rien.
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De retour au pays après une longue absence, le narrateur de ce récit interroge une mémoire infidèle. De reconstructions en falsifications, il se perd progressivement dans son propre passé. Aussi, à travers les images leurrantes de la nostalgie et le thème de l'impossible retour, perce vite le spectre d'un doute identitaire que rien ne viendra lever.Portrait de fleuve est construit comme une sinfonietta. Les motifs qui s'y poursuivent et s'y entrecroisent ne font que prolonger l'écho d'un prétexte musical : rendre perceptible et acceptable l'irréversibilité du temps.