Un été dans un quartier populaire de Barcelone, à la fin des années 1980. Bruno, adolescent solitaire, gagne quelques sous pendant ses vacances en apportant les journaux à sa voisine, Madame Pauli, une vieille dame excentrique dont l'appartement est tapissé de photos en noir et blanc. Avec ces journaux, Mme Pauli confectionne des avions en papier, sur lesquels elle écrit des messages pleins d'espoir avant de les lancer du haut de son balcon. À quels anonymes ou fantomatiques destinataires s'adressent ces messages ? Bruno va peu à peu percer les secrets de la vieille dame : son passé de danseuse en Pologne, et la tragédie qui l'a obligée à fuir son pays.
Bref et poignant, ce roman est l'avant-dernier écrit par Juan Marsé, il est à la fois un récit d'apprentissage, l'histoire d'une amitié improbable, et une fable sur le besoin de réenchanter le quotidien pour combattre les ombres du passé.
Après treize ans de réclusion, jan julivert sort de prison.
Nombreux sont ceux qui l'attendent avec impatience et ressassent son histoire comme une légende de quartier. certains le voit comme un héros antifranquiste et rêvent d'un nouveau combat, d'autres espèrent son concours dans des luttes politiques qui ne sont qu'un alibi au grand banditisme, d'autres encore craignent sa vengeance. son neveu, nestor, le vénère sans l'avoir jamais vu. répondra-t-il à toutes ces attentes, lui qui a échappé de justesse au peloton d'exécution ? cette magistrale chronique noire de la barcelone des années les plus dures du franquisme se lit comme un thriller américain dont le héros, jan julivert, est doté d'une dimension romanesque exceptionnelle.
1949. Une prostituée est retrouvée morte dans la cabine du projectionniste d'un cinéma de quartier populaire de Barcelone. L'assassin, le projectionniste lui-même, est arrêté et condamné. Son procès est marqué par une particularité :
S'il reconnaît avoir tué la jeune femme, et la façon dont il l'a fait - strangulation avec des morceaux de pellicule -, il est en revanche incapable d'expliquer pourquoi il l'a fait, chose d'autant plus intrigante que, sans qu'elle fût sa maîtresse, il éprouvait de l'amour pour elle. Cette particularité lui vaut, durant son internement, un traitement « médical » particulièrement agressif, digne des médecins nazis, auquel ne manque que la lobotomie.
1982. Un écrivain, qui ressemble comme un frère à Marsé, qui a écrit des romans qui sont ceux de Marsé, mais qui ne s'appelle pas Marsé, est engagé par un producteur de cinéma pour écrire le préscénario d'un film tiré du fait divers ci- dessus évoqué. Il aura comme principal informateur l'assassin lui-même, libéré après avoir accompli sa condamnation.
Le roman est donc le récit des rencontres quasi quotidiennes que le narrateur-protagoniste a chez lui avec l'assassin libéré. Au cours de ces entretiens, souvent interrompus par les interventions intempestives - très drôles - de la femme de ménage cinéphile de l'écrivain, celui-ci essaiera de démêler l'écheveau bien embrouillé de la mémoire de son informateur, et dont on ne sait trop si elle est vraiment oublieuse ou si c'est lui qui se livre à une manipulation de ses souvenirs.
On retrouve dans ce livre tous les thèmes principaux de l'univers de Marsé, ici concentrés autour du cinéma, dont il est un fin connaisseur. On y trouve aussi le petit monde de la Barcelone populaire des années 1940, période la plus noire du franquisme triomphant et vindicatif. Ces années sont celles où se déroulent certains des grands romans de l'auteur, qui n'hésite pas ici à évoquer littéralement quelques épisodes et quelques personnages desdits romans, créant par là chez le lecteur une illusion très séduisante.
A travers les trois nouvelles qui composent ce recueil, Juan Marsé recrée son enfance et son adolescence au lendemain de la Guerre civile. Dans Histoire de détectives, des enfants jouent gravement aux justiciers dans une Barcelone meurtrie, mystérieuse et morbide ; dans Le fantôme du cinéma Roxy, un cinéaste caricatural et un écrivain parodique composent un scénario en reconstituant l'atmosphère des vieux cinémas de quartier à l'époque où le pouvoir franquiste asservissait la Catalogne ; enfin, Les aventures d'un lieutenant têtu nous transporte dans une enclave espagnole au Maroc où de jeunes recrues jouent aux soldats de plomb, sous les ordres d'un sergent plus truculent que nature et d'un lieutenant bravache qui joue les acrobates. Ce qui nous vaut un morceau de bravoure à double titre. Et bien entendu, celui qui joue le plus, c'est encore le narrateur, en pinçant tour à tour les cordes de l'ironie, du sordide, du rêve, de la dérision et de la nostalgie. J-C M
Juin 1956, un surnommé " Bande-à-part ", voleur de motos de son état, s'introduit dans une soirée où il rencontre Maruja et Teresa. Après avoir séduit la première, domestique dans une famille bourgeoise, et s'être servi d'elle dans l'espoir de voler des bijoux, il se tourne vers la seconde, jeune et belle étudiante : une " fille de bonne famille " qui lui réservera bien des surprises ... amour et ambition sociale, rêves et mensonges, avec pour toile de fond les révoltes étudiantes dans la Barcelone des années 60, mènent une danse à la fois tendre et cruelle dans ce grand roman de Juan Marsé, qui est déjà un classique de la littérature contemporaine.
Dans l'Espagne franquiste des années quarante, Ringo, rêveur égaré dans Barcelone, se réfugie au bistrot pour observer les déshérités qui défilent derrière la vitrine. Depuis qu'il a perdu tout espoir de devenir pianiste, il s'accroche à l'écriture et entreprend de dépeindre avec extravagance la vie de son quartier. Dans ce quotidien où plane l'ombre menaçante de la dictature, il devient vital d'encrer les rêves pour les garder en vie.
Galardonada en 1993 con el Premio de la Crítica, El embrujo de Shanghai es una estremecedora fábula sobre los sueños y las derrotas de niños y adultos, asfixiados todos por el aire gris de la Barcelona de posguerra. En la Barcelona de 1984, el capitán Blay, con su cabeza vendada y sus suspicacias sobre los escapes de gas que están a punto de hacer volar toda la ciudad, se pasea por el barrio sacudido aún por los estertores de la guerra perdida y acompañado por los espectros gimientes de sus hijos muertos. El pequeño Daniel le escolta a través de aquellas calles póstumas, en las que conocerá a los hermanos Chacón, quienes custodian la verja de entrada de la casa en la que convalece Susana, una niña enferma de los pulmones, hija de la señora Anita, bella y ajada taquillera de cine, y de Kim, un revolucionario, huido del país y nimbado por el fulgor mítico de los furtivos. Pronto llegará a la casa un amigo y compañero de viaje de Kim, Forcat, que narrará a los niños la arriesgada aventura que el padre de la niña emprendió en Shanghai, enfrentado a nazis sanguinarios, pistoleros sin piedad y mujeres fatales que le salen al paso en los más sórdidos cabarets de la ciudad prohibida.
Le 8 mai 1945, un inspecteur fatigué erre dans le dédale des ruelles de Barcelone. Il doit convaincre une jeune orpheline d'identifier le cadavre du vagabond qui, naguère, l'a violée. Entre le flic rogue et la gamine espiègle, un étrange chassé-croisé s'engage, pour laisser place peu à peu à une troublante connivence.
Dans la Catalogne postfranquiste, Joan Marés part à la reconquête de l'épouse qui l'a abandonné dix ans plus tôt : la bellissime Norma Valenti. Pour cela, ce " charnego " qui a toujours parlé castillan se fait passer pour un ami d'enfance... qui parle catalan! Histoire d'un amour fou, trompé, et poursuite aussi loufoque que dérisoire, L'Amant bilingue est un instantané sous forme de comédie douce-amère de la Barcelone où a grandi l'auteur.
«Barcelone, 1949.Son visage, posé de profil sur l'oreiller, se tourna brusquement vers le plafond. Ses lèvres n'étaient plus, comme tout à l'heure, serrées et incolores. Une main raide, à demi fermée, comme pour attraper une mouche, sortit des draps, gauche et alourdie de sommeil.Il s'éveillait peu à peu. À son chevet, pendu au dossier d'une chaise, le veston dégageait un doux relent de cognac et de cigarettes.».
La dictature de Franco pèse sur les mentalités. Puritanisme, mesquinerie et ordre moral sont le lot quotidien de la Barcelone des années 1960. La jeune Montsé, candide et dévouée, illumine la vie de son quartier. Mais lorsqu'elle s'attache à un jeune prisonnier, Montsé passe du côté des rejetés et des indésirables. Juan Marsé raconte comment une innocente tente de défier pacifiquement les codes qui finiront par la broyer.
Où est passé Víctor Bartra, le libertaire anti-franquiste que la police venait arrêter, et qui s'est enfui en sautant dans le ravin qui s'ouvre derrière chez lui ? C'est autour de cette question que se développe une histoire entrelaçant plusieurs destinées : celle de la femme de Bartra, Rosa, splendide et douce rouquine, celle de son fils, David, un gamin révolté et plein de rêves, celle de Galván, l'inspecteur chargé de surveiller la famille Bartra...
Avec ce roman, dont l'action se déroule dans le quartier du Guinardó qu'il a rendu célèbre, Juan Marsé nous donne une nouvelle preuve de ses dons de conteur, de son aptitude à faire naître l'émotion en créant un univers et des personnages que le lecteur, conquis d'emblée, ne peut plus oublier.
À ceux qui s'étonnaient qu'il ne se soit jamais servi des circonstances, fort romanesques, de sa naissance et de son adoption, Juan Marsé avait jusqu'ici l'habitude de répondre que ses mémoires se trouvent dans ses romans et ses nouvelles. " Je comprends que ce soit un thème très littéraire (ou qu'il puisse le paraître à certains) mais je ne l'ai jamais abordé comme tel, bien que mes romans soient pleins de gamins qui s'inventent leurs père, ou qui décident d'être fils d'eux-mêmes ", a-t-il même écrit un jour. Or, c'est une explication que Marsé ne pourra plus avancer : il raconte en effet dans le roman qui nous occupe, et de façon très précise, cet épisode fondateur de sa vie et probablement de son oeuvre : sa mère meurt dix jours après sa naissance, laissant son père, chauffeur de taxi, seul avec sa soeur aînée. Le pauvre veuf ne s'en sort pas et songe à confier le nouveau-né à une autre famille. Et voilà que le hasard s'en mêle : un soir, comme il passe devant une maternité de Barcelone, il est hélé par un couple dont la femme est en pleurs : elle vient de perdre l'enfant qu'elle attendait. Quelques instants plus tard, dans le taxi, affaire est faite : le couple sans enfant se chargera du fils du chauffeur et finira par l'adopter. C'est le point de départ d'un récit qui revient sur les épisodes marquants de l'éducation du jeune garçon, et retrace l'histoire de l'Espagne du XXe siècle.
Ce livre, malgré tous les événements rattachables à la vie de l'auteur, et que tous les connaisseurs de son oeuvre reconnaîtront sans peine, n'est donc pas une autobiographie (l'idée n'en est sans doute jamais venue à l'auteur, trop modeste), et peut-être serait-il étonné (et irrité) qu'on lui dise qu'il peut se rapprocher du genre moderne de l'autofiction. Ce qui n'est d'ailleurs pas sûr, tant il est vrai que ce n'est pas sa vie qui l'intéresse - il ne s'agit pas de Mémoires -, mais ses rêves : il s'est donné pour fonction de les écrire, et de là, encore une fois, son titre de Calligraphie des rêves, sachant qu'en espagnol le premier sens de " caligrafía " est, tout simplement, " écriture ".
On trouve aussi dans ce beau roman ce qui fait une grande partie du talent de Marsé : sa richesse lexicale, sa puissance évocatrice, en particulier dans la création d'images, ses personnages bien campés et objets tout à la fois de l'ironie et de la tendresse de l'auteur, ses dialogues enlevés et sonnant toujours juste, et enfin cet humour qui n'est pas le moindre de ses charmes. Et comme toujours, l'art de suspendre l'intérêt du lecteur, toujours pressé, en fin de chapitre, de lire le suivant.
Après un accident de voiture, parmi les corps qui arrivent à la morgue, Ñito, le vieux gardien alcoolique, reconnaît un ami d'enfance. Son passé remonte à la surface, mêlant ses souvenirs à ceux de ses amis d'alors, une bande d'adolescents naviguant dans les bas-fonds de Barcelone. Les figures de Java, le chiffonier, de Juanita, l'orpheline, ou encore de Tite-Gale, Amen et Lolo ressurgissent. À travers leurs destins bouleversants se dessine le portrait d'une société en ruines, marquée par la misère, les horreurs d'une guerre fratricide et les contraintes d'un état policier.
Il s'agit du premier recueil regroupant l'ensemble des nouvelles écrites par l'auteur. Certaines d'entre elles ont été précédemment publiées en volume, et la plupart ont paru dans différentes revues.
On retrouve dans l'ensemble de ces textes ce qui fait le bonheur de lire Marsé : humour, ironie vacharde, tendresse pour les humbles (qui ont eux aussi droit à leurs verges), et surtout ce talent exceptionnel pour faire vivre ses personnages et créer une atmosphère.
La prose est efficace et brillante, adapté à la rapidité ou à la lenteur du contenu et lui donnant vie. Comme l'a affirmé Manuel Vazquez Montalb an, « Marsé a le don de l'adjectivation imprévisible, hétérodoxe, métisse, même, ainsi que la capacité de décrire un corps humain et sa conduite à partir d'un geste ou d'un trait physique ».
Ces nouvelles sont en tout cas de parfaites illustrations de l'art du romancier selon Marsé, « avoir une histoire à raconter, savoir la raconter, avoir envie de la raconter », et elles sont, à coup sûr, les meilleures passerelles pour accéder aux grands romans de cet écrivain qui n'a pas encore en France la place qu'il mérite.
" Toute femme assise dans un bar de rencontres dans l'attente de clients sait que le comportement d'un homme qui a tout perdu sauf la vie est un mystère. Qui ne le croit pas n'a qu'à le demander aux filles du Lolita's Club, un bar de périphérie minable près de Barcelone où Nancy, Bárbara et Milena vendent des caresses au détail, pendant que doña Lola sert au comptoir et bavarde avec les macs de service.
Au milieu de tout ce sexe fatigué, soudain un sourire, une voix pleine de gaîté : c'est Valentín, un gaillard de trente ans qui agit et pense comme un enfant, une âme simple qui circule dans le bar et les chambres du club, en portant fièrement les plateaux de consommations et en consolant de ses maux par de tendres paroles Milena, jeune Colombienne qu'il adore. C'est là que vient le chercher son frère jumeau Raúl, policier taciturne aux mains de tueur, naguère encore affecté au Pays Basque et qui, suspendu pour mauvaise conduite, s'est vu obligé de revenir passer quelque temps auprès de sa famille.
Les tentatives que fait Raúl pour éloigner Valentín de Milena l'obligent à affronter les dettes du passé, et à les payer avec du sang. Ce qui reste de cet homme - celui qui a tout perdu sauf la vie -, est le mystère que renferment ces Chansons d'amour au Lolita's Club, roman où le talent de Juan Marsé transforme les misères de notre époque en grande littérature ".
Chansons d'amour au Lolita's Club malgré ce titre mi-fleur bleue mi-canaille, est en fait une merveilleuse histoire d'amour. Avec beaucoup d'habileté Marsé situe l'intrigue, et le contraste est saisissant, dans un sinistre boui-boui de nationale, dont elle finit par transcender les misérables amours tarifées. Amour candide et pur de Valentín, le héros légèrement demeuré mais doué d'une force surhumaine, pour Milena, jeune prostituée cocaïnomane et perdue dans ses rêves, mais surtout amour fou de Raúl, le dur de commissariat, pour son jumeau handicapé, qui mourra à sa place, à cause de leur ressemblance, victime d'assassins dont on suppose qu'ils appartiennent à l'ETA, même si le roman entretient le doute sur ce point, grâce à une intrigue digne des meilleurs romans de série noire qui nous conte les démêlés de Raúl avec une famille mafieuse de Vigo et son réseau de traite des blanches. Cet amour fraternel et cette mort sauveront Raúl de la déchéance à laquelle l'alcool semblait devoir le condamner, on assiste à une véritable rédemption, le frère survivant assumant la personnalité du frère disparu lors d'un final aussi émouvant qu'original. Ce qui, et cela ne nous étonnera pas s'agissant d'un roman de Juan Marsé, ne veut évidemment pas dire happy end.
En la cabina de un cine de barrio, una prostituta es asesinada a sangre fría. Pero el misterio no está en el quién ni en el cómo, sino en el por qué. Y ni el propio asesino recuerda el motivo.
Une nouvelle réjouissante d'un des plus grands auteurs espagnols contemporains. Dans l'Espagne franquiste, le lieutenant Bravo fait livrer un nouveau cheval de gymnastique pour l'entraînement de ses troupes. Sa tentative pour en faire personnellement la démonstration se traduit par un désastre pathétique et hilarant.