Il y a des vies qui transcendent leur siècle. elles le sauvent, en quelque sorte, d'un jugement trop sévère de l'Histoire. La vie d'Arthur Koestler fut de celles-là. Né en 1905 dans une famille juive de la Mitteleuropa, Arthur Koestler noua avec l'Histoire une relation tumultueuse et passionnée qui le conduisit de la Vienne crépusculaire des années vingt à Londres où il mourut en 1983, sujet britannique parvenu au faîte d'une célébrité mondiale, en passant par la Palestine de la reconquête sioniste, le Berlin de la montée du nazisme, la Russie stalinienne de la grande famine de l'hiver 1932, l'Espagne de la guerre civile où il fut condamné à mort, la France de la drôle de guerre qui l'enferma dans un camp d'indésirables, le Londres de la résistance héroïque à Hitler où il trouva refuge, le Paris effervescent de la Libération, l'Amérique du maccarthysme naissant et l'Etat d'Israël à peine proclamé et déjà assailli. Auteur, avec Le Zéro et l'Infini, d'un des plus grands livres de la littérature politique du XXe siècle, exilé perpétuel, cosmopolite déraciné, calomnié et persécuté de son vivant, voué à une sorte d'oubli depuis sa mort, Arthur Koestler fut de tous les grands combats de son temps. Militant de la grande croisade antifasciste de l'entre-deux-guerres, il rompit avec le communisme lors des procès de Moscou et fut du petit nombre de ceux qui osèrent défier ensemble les deux grands systèmes totalitaires dont, l'un des premiers, il pressentit l'identité profonde. Rien ne put dévier sa route. rien n'échappa à son regard critique et à la liberté de son jugement. Ce livre est l'histoire de cette vie hors du commun. C'est aussi le récit d'une époque qui s'enivra d'abstractions criminelles et renia son humanité au nom d'utopies monstreususes. Michel Laval nous la fait revivre avec un exceptionnel talent de narrateur, en suivant pas à pas, combat après combat, un de ses acteurs les plus lucides et les plus courageux.
Le 19 janvier 1945, la cour de justice de la Seine condamne à mort l'écrivain et journaliste Robert Brasillach.
Son crime ? Avoir sciemment entretenu avec l'Allemagne, depuis le 16 juin 1940, des «intelligences» en vue de favoriser les entreprises de celle-ci contre la France et les nations alliées.
Les preuves ? Une centaine d'articles parus dans les hebdomadaires collaborationnistes Je suis partout et Révolution nationale, un siège au conseil d'administration de la librairie de propagande allemande Rive gauche, des rapports suivis avec la Propagandastaffel de l'Institut allemand, deux voyages en Allemagne en 1941 et 1943. plusieurs conférences données à travers l'Europe occupée. Les débats devant la cour ont duré six heures. Six heures âpres et sombres, denses et dénudées comme un «drame antique». Avec leur cortège de passions a vif et de haines tenaces.
Vingt jours plus tard. Sa sentence est exécutée.
Un demi-siècle se sera bientôt écoulé sans que la controverse sur le procès et l'exécution ne trouve son issue. D'un côté, la trahison du clerc engagé dans la collaboration, de l'autre la persécution du poète rallié au pouvoir légal du moment et la dénonciation d'une justice expéditive.
Le procès de Robert Brasillach, procès exemplaire, n'a pas avec le temps épuisé toutes ses significations.
Né en 1949, Michel Laval est avocat. Brasillach ou la trahison du clerc, son premier livre, est une réaction contre tous ceux qui, aujourd'hui, pour réhabiliter la mémoire de Robert Brasillach, n'hésitent pas à excuser l'inexcusable.