Autoportrait d'un humaniste compétent, qui s'est mis toute sa vie au service de la collectivité, s'appuyant pendant soixante ans sur le slogan de l'action catholique des jeunes, qui l'a formé : voir, juger, agir.
Claude Neuschwander a dirigé Publicis et la Fnac, présidé l'Unef et l'Adels, créée Ten, coopérative pionnière de consultants, conseillé Edgar Pisani et inventé les conseils de résidents, à Sarcelles ; mais il est surtout connu du grand public pour son rôle dans la reprise de Lip, cette usine symbole d'une autogestion ouvrière dans les années 70, mais encore présente dans les mythes politiques français, juste après mai 68.
Il en fut le patron durant cette période.
En 1973, les ouvrières et ouvriers de l'usine horlogère Lip à Besançon s'opposent aux licenciements qu'on leur promet : occupation, confiscation du stock de montres, redémarrage partiel de la production, organisation des premières paies ouvrières. En mars 1974, au terme d'un conflit au retentissement mondial, devenu un véritable mythe du mouvement social, leur entreprise redémarre, relancée par un consortium d'actionnaires emmené par Antoine Riboud et soutenu par l'État. Les licenciements sont évités. C'est la victoire ouvrière.
Mais deux ans plus tard, c'est la faillite. Ceux qui avaient relancé Lip accusent alors Claude Neuschwander, qu'ils avaient placé à la tête de l'entreprise, d'en être le principal responsable. Celui-ci clame pourtant haut et fort que la décision de liquider Lip est un choix politique : le patronat et l'État ont-ils délibérément interrompu la relance ? Ont-ils tué Lip et, si oui, pourquoi ?
Cet ouvrage propose de suivre l'hypothèse d'une mise à mort politique de l'entreprise horlogère, en la réinscrivant dans un tournant néolibéral qui la dépasse et l'explique. Engagés dans un travail commun, explorant des séries d'archives inédites, Claude Neuschwander et Guillaume Gourgues, chercheur en science politique, retracent ici méticuleusement cet épisode majeur de l'histoire du capitalisme français qu'a été la relance de Lip.
Considérer la fin de Lip comme le résultat d'une stratégie délibérée débouche sur une lecture nouvelle de l'ordre néolibéral actuel qui s'enracine précisément dans cette seconde moitié des années 1970. Cet ouvrage rappelle que le fonctionnement de l'économie se fonde largement sur des choix politiques, et que les licenciements n'ont pas toujours été considérés comme une inévitable loi du marché ou une variable d'ajustement nécessaire de la compétitivité des firmes.
Ce livre invite à faire face à la triple exigence de la Démocratie vis-à-vis des valeurs de la République, tellement traditionnelles que l'on en sous-estime l'importance et l'actualité, tellement banalisées que l'on oublie combien d'hommes sont morts pour qu'elles vivent : la Liberté, l'Egalité, la Fraternité oe
Les forces vivantes de progrès ne coïncident plus avec les frontières traditionnelles du socialisme organisé. Elles doivent reconnaître comme Projet politique de faire vivre la Démocratie, au travers des valeurs de solidarité, de liberté et de responsabilité dont elle est porteuseoe Il leur faut se battre pour que la démocratie vive et s'exprime, dans la vie politique certes, bien loin d'être un modèle, mais aussi dans l'économie, pour qu'elle cesse de générer de l'inégalité et de la précarité, dans la culture pour que chacun ait droit à l'émotion, dans le développement de la vie locale, dans l'éducation et l'école, échelle sociale historique de la République, dans la santé enfin accessible à tous, dans la solidarité sociale..., bref dans l'ensemble de la Société européenne, toute entière, pour qu'elle soit modèle, différent mais efficace, alternative devenue crédible aux attentes des citoyens du monde.