Voilà minutieusement reconstituée la tradition anti-urbaine aux États-Unis, depuis les premières communautés cherchant une alternative aux formes traditionnelles de regroupement en agglomération. Longtemps considéré comme un paradis, ce Nouveau blonde offre de l'espace et de la nature à revendre. Alors quand les premiers effets de l'industrialisation se dessinent en ville, penseurs et poètes voient, dans un retour auprès de la nature et à la vie sauvage, une volonté de renouer avec la vraie tradition américaine, celle du pionnier. Sur ce nouveau territoire, la ville est jugée comme une tare européenne dont l'importation apparaît inopportune, pire dénoncée depuis le XVIIIe siècle par nombre de philosophes, penseurs, prêcheurs, etc. Au début du siècle dernier, architectes et urbanistes relaient cette critique de la ville corruptrice. Ainsi, le grand architecte américain Frank Lloyd Wright prône une désertion des villes pour renouer avec les bases agraires originelles de la civilisation américaines. Il voit dans la démocratisation de l'automobile, l'outil qui permettra la fuite hors la ville, loin de toute concentration. L'encouragement à résider sur des terrains vierges loin des centres villes est devenu depuis un mode dominant de la croissance urbaine. Ce phénomène d'étalement urbain et de suburbanisation trouve en Los Angeles son exemple majeur. Certains analystes de cette métropole, tel Mike Davis le considère, comme annonciatrice du chaos et des catastrophes à venir. Au bout du compte, la célébration du paysage et celle de la nature auraient-elles produit la pire des communautés humaines ? Toutefois, Seattle ou Phoenix conçoivent une autre façon d'habiter le monde dans une relation plus attentive avec le paysage.
Thomas Jefferson a fait l'objet de très nombreuses publications concernant sa vie, sa carrière politique, sa philosophie, ses voyages, ses écrits, son architecture. En revanche, il n'existe presque rien sur sa conception du territoire alors que c'est sans nul doute le domaine où son influence a été la plus importante pour l'organisation concrète des Etats-Unis : comment planifier un continent dont on ignore tout. L'ouvrage analyse cette vision jeffersonienne ; il met en évidence à la fois les sources de cette conception politico-territoriale destinée à construire une nation totalement différente des antécédents européens - soit essentiellement anti-urbaine - et l'évolution lente de ces moyens d'instaurer un paysage systématique, lesquels feront toutefois, ô surprise, émerger aussi des villes intenses et sans commune mesure avec les capitales de la vieille Europe.
Il faut souligner que ces règles d'organisation du continent américain ont été pensées et appliquées alors même qu'on ne savait rien de sa topographie, de la nature du sol et du sous-sol, de la trame des cours d'eau, du climat, etc. : la construction de cette grille de distribution de la population et des activités, qui ne tenait d'ailleurs par principe aucun compte des Indiens, relevait donc de l'utopie - un concept qui, à la fin du XVIIIe siècle, ne signifiait nullement une vision irréalisable, mais bien un projet à plaquer sur l'immensité présumée vide de l'espace qui s'étend des Appalaches au Pacifique. Cette opération de quadrillage débute en 1785 pour s'achever en 1910 lorsque la côte Pacifique est atteinte. Le principe d'égalité comme le rapport personnel à la Nature qui sous-tendait la vision territoriale de Jefferson ont été récupérés au XXe siècle par l'architecte Frank Lloyd Wright dans son projet de Broadacre City.
Format : 150 x 250 mm Nombre de pages : 272 pages Tirage : 2000 exemplaires
Illustrations : 100 Couleur et N&B Collection : École architecture de Grenoble
ISBN : 978-2-915456-52-3 Pour une poétique du détour Hommage à André Corboz
Sous la direction de Catherine Maumi André Corboz, revendique une posture
intellectuelle originale dans le milieu scientifique, une posture qui favorise
le savoir autodidacte de manière à échapper aux frontières disciplinaires afin
de jouir d'une totale liberté de pensée et « dériver » d'un champ à l'autre au
gré de ses intérêts et interrogations. Il vagabonde ainsi entre l'histoire de
l'art, l'architecture, l'urbanisme, le paysagisme, la géographie, bref ces
recours lui offre une façon de concevoir le monde libérée des a priori tout
comme des images consensuelles, faisant appel à une ouverture d'esprit et une
curiosité sans bornes. Ainsi, qu'il s'agisse de peinture comme dans le cas de
la « Venise imaginaire » de Canaletto ou du « tunnel » chez Hubert Robert,
qu'il s'agisse de l'architecture, de la ville et du territoire américains, des
territoires urbanisés contemporains, qu'il s'agisse de paysage ou de sculpture,
ce dont il est question dans les investigations menées par André Corboz, c'est
de déconstruire une image mythique pour retrouver pied avec la réalité, ou tout
au moins une certaine réalité. Comme il nous explique, l'histoire est à chaque
fois « un produit du cerveau de l'historien. Avant d'avoir été pensée,
l'histoire n'existe pas ; elle n'est que chaos de tendances et d'événements ».
Dans le cadre de cet hommage rendu à André Corboz par des spécialiste venant
des Etats-Unis, de Suisse, d'Italie et de France, il a été choisi d'orienter
les réflexions autour de deux axes majeurs, l'un renvoyant plus spécifiquement
à la question de méthode, de mode de pensée, tandis que le second interroge les
concepts mobilisés pour penser la ville et le territoire en ce XXIe siècle.
L'ouvrage comprend une bibliographie exhaustive des quelques deux cents écrits
d'André Corboz André Corboz en naît Suisse en 1928. Après des études de droit à
l'Université de Genève. Il va rapidement succomber à une vocation d'historien
autodidacte qui se penche sur l'histoire de la ville. Il sera professeur à
l'Université de Montréal, puis il sera en charge de la chaire d'histoire de
l'urbanisme à l'École polytechnique fédérale de Zurich. Le dernier ouvrage de
son abondante bibliographie s'intitule Le territoire comme palimpseste qui
s'est vu décerné, par France Culture er la revue Urbanisme, le prix « La Ville
à lire » décerné. En 2003, l'Académie d'architecture lui décerne la médaille de
l'Histoire de l'art.
Ville imaginée par Frank Lloyd Wright à partir de 1932, Broadacre City est une proposition globale défendant un modèle économique, social, politique, différent de celui en cours. Il interroge le devenir de la grande ville, de la campagne, la transformation des paysages, l'uniformisation des modes de vie et des espaces.