« Songez que je suis née ici, que mon père, ma mère, mon grand-père vivaient ici : j'aime cette maison. Sans la Cerisaie je ne comprends pas ma propre vie et, s'il faut vraiment vendre, qu'on me vende avec le jardin... » La propriété a beau représenter pour Lioubov son enfance et le souvenir d'une vie de nonchalance, Lopakhine, ancien serf devenu marchand, l'achètera, mais afin d'en abattre les arbres comme si, pour posséder cette Cerisaie de peu de rendement mais qui le relie pourtant lui-même aux temps anciens, il fallait d'abord la détruire parce qu'ici la beauté et la mort ont partie liée.
En 1904, c'est ainsi la fin du monde aristocratique et l'entrée triomphante d'une classe d'entrepreneurs que Tchekhov met en scène jusqu'aux coups de hache qui meurtrissent le silence, quand les acteurs se sont retirés. Et lui-même mourra quelques mois plus tard.
Tchekhov Oncle Vania L'hiver à la campagne, le thé à sept heures du matin, les soirées interminables, le dégoût des autres et surtout de soi-même. L'ennui est là, comme une espèce de boue gluante dans laquelle on s'enlise, comme des sables mouvants qui les engloutiront tous, Vania, Sonia, Astrov.
Dans un dernier sursaut, ils sortent la tête, essaient de haïr, d'aimer, de tuer, de se tuer... Ils n'en ont plus la force, ni l'envie. Rien que de penser à tout ce qu'ils auraient pu être, à tout ce qu'ils auraient pu faire. Oui, mais quoi oe Ailleurs, sans doute, il existe autre chose, une autre vie. En Afrique, il fait chaud.
Tchekhov, peintre génial et docteur impuissant du terrible mal de ne pas vivre.
Nouvelle traduction et préface de Bruno Sermonne et Tonia Galievsky.
Commentaires et notes de Patrice Pavis.
Dans une propriété à la campagne sont réunis : une actrice sur le retour, Arkadina, qui vit avec Trigorine, écrivain connu. Le fils d'Arkadina, Treplev. Lui aussi est écrivain, à la recherche de formes nouvelles. Enfin Nina, fille d'un riche propriétaire. Treplev est amoureux de Nina, mais elle va être séduite par Trigorine, partir avec lui pour être abandonnée et commencer une médiocre carrière d'actrice. Treplev, qui échoue dans son oeuvre et dans son amour pour Nina, se suicide.
Tel est le fil directeur d' « Histoires trompeuses », un recueil de sept récits peu connus de Tchékhov, qui illustrent la propension de notre esprit à se laisser leurrer, que ce soit dans dans des petites choses concrètes (un gardien de cimetière croit rencontrer un mort, un promeneur cède à la panique devant l'incompréhensible, un fonctionnaire cherche l'explication la plus improbable à un phénomène inexpliqué, un jeune homme fait à une jeune fille une farce qui la fait douter d'elle-même et la marque pour toute sa vie) ou dans les grandes, comme l'idée que nous nous faisons de la gloire, du bonheur ou de la charité.
" Ce qui est médiocre, dit un personnage dans Ionytch, ce n'est pas de ne pas savoir écrire des nouvelles, mais d'en écrire et de ne pas savoir le cacher. " Petit clin d'oeil ironique d'Anton Tchékhov, qui a publié des centaines de nouvelles... et ne l'a pas caché. Celles qui composent le présent recueil ont été écrites entre 1891 et 1898. Tchékhov est au sommet de son art, mais on peut trouver que son inspiration devient de plus en plus noire. Ses héros ne vivent pas des tragédies. Ils s'enlisent dans l'ennui, la monotonie des jours, la banalité. Le romanesque repose d'habitude sur la singularité d'un individu. Tchékhov réussit le tour de force de le créer avec des gens ordinaires. Seule exception, la longue nouvelle Récit d'un inconnu comporte des péripéties, des voyages, des coups de théâtre. Un socialiste s'introduit comme domestique chez le fils d'un grand personnage, afin de surprendre les secrets du père, voire saisir une occasion de l'assassiner. Mais une femme survient...
Voici des nouvelles sur le «royaume des femmes». Ainsi, la Dame au petit chien promène son ennui et son chien sur la digue d'une station de la mer Noire. Un homme solitaire la remarque, l'aime, mais ne peut triompher plus tard de toutes les barrières qui se dressent sur le chemin de leur bonheur.
Tchékhov souffrait d'une impossibilité d'aimer. Mais l'amour lui inspire émotion ou ironie («Si vous craignez la solitude, ne vous mariez pas»), et une grande variété de tableaux : «Une nouvelle qui n'a pas de femmes, écrit-il, c'est une machine sans vapeur.» L'héroïne par excellence est pour lui la femme incomprise, qui rêve d'une autre vie, inaccessible.
La toute première pièce de Tchekhov (1860-1904), écrite autour de 1878, jamais jouée de son vivant, est ici présentée dans sa version intégrale, pour la première fois traduite en français par André Markowicz et Françoise Morvan, et leur a valu de recevoir en 2006 le Molière de la meilleure adaptation.
« Nina : Ainsi, vous êtes devenu écrivain... Vous êtes écrivain, et moi, actrice... tous les deux dans le tourbillon... Jadis, j'étais heureuse comme une enfant, je chantais le matin en me réveillant, je vous aimais, je rêvais de gloire, et maintenant ? Demain de bonne heure je partirai pour Eletz, en troisième... avec des moujiks ; à Eletz, des marchands cultivés m'assommeront de compliments. La vie est brutale !
Treplev : Pourquoi aller à Eletz ?
(La Mouette, Acte IV).
Quand tchékhov part pour l'île de sakhaline, en avril 1890, personne ne comprend ses raisons.
Lui-même, incapable d'en donner, se contente de parler de mania sachalinosa. il s'agit là de l'épisode le plus étrange de sa vie. décidé à mener une enquête sur ce lieu maudit voué au bagne et à la déportation, il se met en route dans des conditions folles. il n'a aucun papier officiel, ni ordre de mission, ni même une lettre de recommandation. après deux mois et demi d'un voyage exténuant, il risque de se voir prier de retourner d'où il est venu.
Il affronte le froid, la pluie, les inondations, puis la chaleur, la poussière, les incendies de forêts. voici enfin l'île de sakhaline, au large de la sibérie : " tout autour la mer, au milieu l'enfer. "
Grigori Tsyboukine, homme d'âge mûr à l'énergie inépuisable, est l'un des principaux commerçants de son village. Il y tient l'épicerie et se livre à toutes sortes de trafics, en prenant soin de tromper et flouer tant ses clients que ses fournisseurs.
L'un de ses fils, sourd et faible d'esprit, est marié à une très belle jeune femme, qui seconde à merveille son beau-père dans son commerce mais pourrait bien nourrir secrètement de plus vastes ambitions. L'autre est devenu policier et mène une joyeuse vie de célibataire dans la ville voisine. Guère aimés de leur entourage, ils vivent dans l'aisance, parfaitement satisfaits de leur sort, jusqu'au jour où l'agent de police est accusé de trafic de fausse monnaie...
« Je n'ai personne, Nikitouchka, ni parents, ni femme, ni gosses... Seul comme le vent dans la plaine... » Deux hommes sur la scène vide d'un théâtre désuet de province se remémorant leur jeunesse, une demande en mariage devenant querelle mesquine à propos de la possession de terres, les soliloques de quatre personnages dans une banque fêtant son quinzième anniversaire, un conférencier fourbu livrant à ses auditeurs toute sa tristesse... Drames ou farces, ces quatre oeuvres brèves sont chacune des pièces d'orfèvrerie tchékhovienne, où se débattent des individus aux solitudes vertigineuses.
Pour la première fois l'ensemble de l'oeuvre de Tchékhov est offerte au public français sous la forme ramassée de trois volumes de la Pléiade. Le premier tome comporte le Théâtre, traduit par Elsa Triolet, y compris le Platonov, oeuvre de jeunesse étrange et touffue, récemment mise à jour, qui profile en un raccourci baroque tout l'univers théâtral du Tchékhov de la maturité. Le théâtre est suivi des Récits pour la période 1882-1886. C'est l'époque des débuts de Tchékhov; elle est dominée par sa participation aux petites revues satiriques du temps et par la veine humoristique, mais, derrière la fantaisie pittoresque, pointent déjà l'émotion et l'acuité de l'oeuvre ultérieure.
Les traductions, célébrées, de Gabriel Arout (Aroutcheff), dramaturge et écrivain d'origine russe sont reconnues comme parmi les plus belles des nouvelles de Tchekhov mais jamais rééditées jusqu'à présent.
Le Moine noir est suivi de deux autres nouvelles : Une morne histoire et Volodia Avec une très belle préface de Daniel-Rops, de l'Académie Française.
Trois nouvelles tragiques. Une plongée au plus profond de l'Ame humaine.
Un sommet de la littérature.
Légende ou réalité, cet inquiétant moine noir dont le retour est annoncé dans nos contrées, après une disparition de mille ans ? Réalité, répond Kovrine, le héros du récit, brillant universitaire. philosophe, qui a l'heur - ou le malheur - de rencontrer le moine et de disputer avec lui. Légende, réplique l'entourage de Kovrine, qui ne voit là qu'affabulations et visions malsaines de sa part... Légende ou réalité, l'histoire du moine noir fournit à Tchekhov le prétexte à une réflexion sur le bonheur et le génie, les êtres d'exception et le lot commun. Puissance obscure, le moine noir incarne la tentation de l'orgueil pour le héros qui y cédera, semant autour de lui malheur et souffrance. Le juste prix de sa témérité sera la perte du Jardin d'Eden de l'enfance.
La nouvelle ne passa pas inaperçue. Le critique Mienchikov avoua avoir été effrayé par le récit de la maladie mentale du héros, et il n'est pas le seul. Tolstoï trouve la nouvelle « ravissante ». Meyerhold la placera plus tard parmi les meilleurs récits de l'auteur.
Une morne histoire . Quels étranges liens unissent la jeune Katia et le vieux professeur d'université Nicolaï Stépanovitch ? Il a regardé grandir l'orpheline, l'a vue amoureuse et heureuse, puis souffrante et désespérée. À l'automne de sa vie, Nicolaï a perdu toutes ses illusions et partage avec Katia les mêmes ténèbres et les mêmes silences, sans pouvoir lui tendre la main... Une nouvelle sombre et cruelle où bonheur et amour semblent inaccessibles.
Volodia est un jeune homme de dix-sept ans. Il est laid, gauche et mal dans sa peau. Invité avec sa mère à la campagne chez les Choumikhine, ils sont reçus comme des parents pauvres, son amour-propre en souffre. Il tombe amoureux d'une cousine lointaine, Niouta :
Elle est mariée, elle a trente ans et se moque continuellement de lui. Elle lui cède, il a quelques minutes de bonheur dans le couloir. Le lendemain, il rentre avec sa mère dans la pension de famille où ils habitent, trouve un revolver et se suicide.
Alexeï Laptev a trente-quatre ans quand il se rend au chevet de sa soeur malade, dans une petite ville de province. Il y tombe amoureux d'une jeune femme de douze ans sa cadette et ne sera pas long à la demander en mariage, sachant pourtant que sa passion n'est pas payée de retour. Laptev n'est pas un homme séduisant, mais il a pour lui sa droiture ainsi qu'une solide fortune, et sa demande sera acceptée. Trois années vont s'écouler, durant lesquelles les sentiments vont évoluer, le futur se dessiner, très logiquement sans doute mais avec cette nuance d'étrangeté, ces petits riens imprévisibles que l'art de Tchékhov est de parfaitement restituer, pour saisir la vie dans ce qu'elle a de plus intime, de plus secret, de plus singulier.
de même que tchekhov est l'auteur de nouvelles qui sont devenues les modèles du genre, il a composé des "petites" pièces qui, étudiées par tous les élèves des conservatoires et écoles de théâtre, sont parmi les plus grandes du répertoire mondial.
il les a écrites pour la plupart en 1888 et 1889, soit entre la première et la deuxième version d'lvanov, au moment où il s'interrogeait avec le plus d'acuité sur le théâtre. exemples de finesse et de légèreté, ces courtes pièces sont souvent des transpositions de nouvelles d'une densité particulière, comme dans le cas de sur la grand-route (1884), "étude dramatique" qui est un véritable chef-d'oeuvre.
Dans une ville de province, perdue dans l'immense Russie, trois soeurs s'ennuient, mais espèrent : Moscou, le retour de l'enfance, la vraie vie... Tout est encore possible, le deuil est fini, la vie attend.
La vie s 'écoule, sans événement. Les officiers vont et viennent. Tous s'accrochent aux mots, mais les mots tuent ou s'usent.
Les trois soeurs n'iront jamais à Moscou. Elles ont tout perdu, même l'espoir de partir. Les Trois Soeurs, la plus tchékhovienne des quatre grandes pièces de Tchékhov, a inspiré les plus grands metteurs en scène depuis Stanislavski jusqu'à Pintilié et Krejca.
Comment vivre, comment survivre, en ce monde, en Russie et ailleurs ?
« A la fin, les soeurs sentent que c'est seulement en reconstituant leur ensemble qu'elles peuvent survivre. Elles se cherchent, s'embrassent, en quête d'une unité nécessaire. Olga n'a-t-elle pas peur non pas du fait qu'on va les oublier, mais plutôt du fait qu'on va oublier combien elles étaient : la femme-mère, la femme-femme, la femme-enfant. Trois, la perfection » ( Lucian Pintilié ).
Les trois nouvelles qui composent ce recueil jalonnent trois étapes décisives de la vie et de l'oeuvre d'Anton Tchékhov. La Steppe marque son entrée dans la littérature, Salle 6 sa rupture avec la doctrine tolstoïenne de la non-résistance au mal, L'Évêque l'imminence de la mort.
Dans la première nouvelle, l'immensité de la steppe russe est vue à travers le regard d'un enfant qui entreprend un long voyage, sur des chars à boeufs, vers le lointain lycée qui l'attend, vers une vie inconnue. La deuxième a pour triste héros le docteur Raguine qui, après avoir accepté dans l'indifférence la souffrance de ses malades, les mauvais traitements qui leur sont infligés, meurt en disant : «Tout m'est égal.» Quant à l'évêque, dont Tchékhov nous conte les derniers jours, comment ne pas songer à l'auteur lui-même, à bout de forces, encombré de sa gloire, assailli par les importuns, qui voit venir la mort et qui bientôt sera remplacé, oublié...
La jeune Anna Akimovna a hérité d'une usine dont elle doit assurer la direction. Mais, à vingt-cinq ans, quelle riche et jolie femme voudrait passer ses soirées à travailler ? D'autant que, parmi ses ouvriers, le beau Pimenov ne la laisse pas insensible. Et elle se prend à rêver.
Deux nouvelles acides sur l'amour et ses malentendus par l'un des grands maîtres de la littérature russe.
« Dans l'histoire de la littérature, écrit Simon Leys, je ne vois guère que Tchekhov chez qui la qualité de l'homme semble avoir correspondu à la qualité de l'artiste. » Vivre de mes rêves en est la vivante illustration. C'est le roman vrai de la vie d'un génie humble, soucieux du sort des autres et d'une rare générosité, dont, par-delà le temps, on a envie de conquérir l'amitié bienveillante, moqueuse, tendre et fidèle...
Cette vaste correspondance permet d'accompagner au fil de son existence cet homme et écrivain aussi soucieux de son art que dévoué à sa famille, à ses amis, à ses patients - un médecin animé par une conception humaniste de son métier et une inquiétude profonde devant l'absurdité de la condition humaine mêlée, pour celle-ci, d'une tendresse fraternelle. Dans ce choix de lettres il raconte sa passion pour le théâtre, son dangereux voyage de reporter à l'île bagne de Sakhaline, ses démêlés avec les éditeurs de ses récits. Grâce à ses conseils à des apprentis écrivains, on peut aussi apprécier les secrets d'un art d'écrire unique, exquis et délicat. « Ma fonction, confiait-il, consiste uniquement à avoir du talent, c'est-à-dire à savoir distinguer les dépositions importantes de celles qui ne le sont pas, à savoir éclairer les personnages et parler leur langue. Chtcheglov-Leontiev me fait grief d'avoir terminé mon récit par la phrase suivante : « On n'y entend goutte en ce monde ! » D'après lui, l'artiste-psychologue se doit d'analyser, c'est en cela qu'il est psychologue. Mais je ne suis pas d'accord avec lui. Il serait temps que les gens qui écrivent, en particulier les artistes, reconnaissent qu'en ce monde on n'y entend goutte. » Des farces entre frères ou cousins aux histoires d'amour impossibles, c'est un Anton Tchekhov intime, sans fard, qui s'offre à nous jusque dans les dernières années de sa vie, découvrant l'amour et le bonheur au moment où la maladie va l'emporter inexorablement.
Dans la préface éclairante et passionnée qu'il consacre à ce volume, Antoine Audouard, initiateur et éditeur du projet, rend hommage à juste titre au « travail admirable » de la traductrice, Nadine Dubourvieux, dont la première tâche fut de choisir les lettres dans la monumentale édition soviétique des oeuvres complètes et de traquer avant de les rétablir les nombreux passages censurés pour indécence, restituant ainsi Tchekhov dans sa vérité sans rien occulter de ses faiblesses ou de ses préjugés.
Un quotidien fait de calculs mesquins, une cuisante déception amoureuse, un profond sentiment de désarroi face à l'existence... Les personnages de ces nouvelles sont englués dans une existence qui leur rétrécit l'âme, qui éteint leur joie de vivre. Mais peut-être nous invitent-ils à méditer le conseil que se donne l'un d'entre eux:«La vie est effrayante, alors il n'y a pas à se gêner avec elle, brise-la et prends tout ce que tu peux lui arracher avant qu'elle ne t'écrase.» Qu'est-ce qu'une vie réussie? Quatre nouvelles pour découvrir un immense écrivain au sommet de son art.
Un soir, il neigea.
En rentrant du travail je trouvai mlle maria dans ma chambre.
" pourquoi ne venez-vous pas à la maison ? puisque vous ne vouliez plus venir chez moi, c'est moi qui suis venue chez vous. " elle fondit en larmes :
" la vie m'est pénible, très pénible, et je n'ai personne d'autre que vous au monde ! ne m'abandonnez pas ! " tandis qu'elle cherchait un mouchoir pour essuyer ses larmes elle esquissa un sourire ; nous restâmes un moment silencieux, puis je la serrai dans mes bras et je l'embrassai en m'égratignant la joue jusqu'au sang contre l'épingle piquée dans son chapeau.
Et nous nous mîmes à parler comme si notre intimité datait de très, très longtemps...
Iakov Ivanonov gagne sa vie tant bien que mal en fabriquant des cercueils dans une petite bourgade où l on ne meurt pas assez à son goût. Âgé de soixante-dix ans, il vit obsédé par les petits aléas de son commerce, sans considération pour ce qui l entoure. Il faut que sa discrète épouse passe de vie à trépas et que lui-même tombe malade pour qu il réapprenne à observer le monde. Le Violon de Rothschild est la chronique d une rédemption in articulo mortis, une fable dans laquelle les regrets ne sont pas qu amertume et font parfois naître un élan salvateur.
À vingt-cinq ans, Missaïl perd pour la dixième fois la petite place d'employé de bureau dans laquelle il végétait. Affligé d'une inaptitude chronique à prendre au sérieux la stricte observation des convenances et de la hiérarchie sociale qui régit la petite ville où il est né, il cherche avec une parfaite bonne foi une façon de vivre qui ne lui donnerait pas en permanence l'impression d'étouffer.
Qu'il s'agisse de la profession qu'il choisit d'exercer ou de sa vie matrimoniale, il va découvrir que l'amour et le respect de la liberté ont un prix terriblement élevé, et que ceux qui l'entourent ne peuvent que rendre plus amers les renoncements et sacrifices qu'il a décidés.
Ma vie, qui parut en 1896, l'année de l'achèvement de La Mouette et d'Oncle Vania, est l'une des nouvelles les plus amples qu'écrivit Anton Tchékhov (1860-1904).
Anton Tchékhov est un farceur, plus précisément un auteur de farces. Il s'agit ici de deux farces en un acte, datant de 1888 : Une demande en mariage et L'Ours. On y a ajouté en fin de volume un court récit de 1886, une attrape, une petite tromperie, intitulé Raté. Les petites pièces en un acte, ces petites farces comiques et tragi-comiques, sont des tableaux de moeurs où s'exprime pleinement la drôlerie, l'humour particulier de Tchékhov. »La drôlerie de Tchékhov est d'une saveur, d'une violence grotesque incomparables. Elle n'est pas toujours prisonnière de la démonstration satirique, mais sait être folle, échevelée, jongler pour le plaisir avec les mots, les masques, l'absurde et le fantasque.» L'intérêt de l'édition réside aussi dans la fabrication de l'ouvrage. Tout est ici un peu farceur : le papier nappe de la jaquette, la mise en page des dialogues, la couleur des papiers, le petit format. Nous reprenons le format des Demi-Cosaques, une collection dans laquelle ont été publiés les livres de Max Frisch, Frans Masereel, Marcel Proust (Mort de ma grand-mère) et prochainement les Sonnets de Shakespeare. P.-S. : Deux ans plus tard, dans un registre plus grave, Tchékhov partira pour Sakhaline, l'île des bagnards. Il traverse toute la Russie et la Sibérie. Nous avons publié deux volumes relatant ce périple et cette enquête : - L'Amour est une région bien intéressante - Sakhaline.