Au Malawi, le «Kusasa fumbi» désigne une tradition suivant laquelle les vierges sont déflorées par des hommes que l'on appelle les hyènes. Dans ce roman qui questionne la figure du paria autant que l'oppression sexuelle subie par les femmes, Fabienne Juhel suit successivement une jeune fille nubile, Elia, et un homme-hyène, Ladarius, qui se découvre malade du Sida.
À la fin de la Seconde Guerre mondiale, dans une petite ville bretonne, une jeune fille est tondue par son ami d'enfance, devant le village, pour avoir vécu une histoire d'amour avec un officier allemand. Après cette humiliation publique, elle décide de se venger. Un magnifique portrait de femme libre.
Arsène Le Rigoleur est un paysan d'une quarantaine d'années qui vit en Bretagne intérieure, ancré à sa terre et rusé comme un renard. Son village, c'est son territoire, et gare à ceux qui viendraient fouiner dans ses histoires. Dans la métairie voisine, une belle ferme rénovée du XVIIe siècle, une famille vient de s'installer, les Maffart. Ils appartiennent au monde détesté de la ville. Dès les premières incursions de leurs deux enfants dans la cour du Rigoleur, la peur s'installe. Qui est-il vraiment ? Sans doute pas ce qu'il donne à voir : cet ours célibataire un peu simplet qui, du matin au soir, s'occupe de ses vaches et de son poulailler. Car Le Rigoleur, narrateur du roman, ne cache rien au lecteur des profondeurs troubles de son personnage. C'est un renard, oui, et depuis sa tanière il surveille son aire de chasse et règle ses comptes à sa façon.
Fabienne Juhel explore un territoire imaginaire aux franges du naturalisme et de l'onirisme dans un roman singulier, composé dans une langue brute qui reconstitue un parler populaire plein de verdeur, ironique et violent.
Novembre 1870, Conlie. Un jeune homme malingre, affublé d'un uniforme trop grand pour lui, se fait passer pour un soldat et pénètre dans le camp où l'armée de Bretagne est rassemblée. Tristan Corbière ne vient pas se battre, il vient pour dénoncer, avec sa plume de poète, la plus monstrueuse trahison qui soit. Les milliers de Bretons qui se sont mobilisés pour rejeter les Prussiens hors de France, croupissent ici, dans la boue et le froid, sans ravitaillement et sans armes, en proie aux maladies et au désespoir, abandonnés par le gouvernement français.
Novembre 1930, Quimper : le sous-préfet Jean Moulin découvre, stupéfait, grâce à « La pastorale de Conlie » que Corbière écrivit, cette honteuse tragédie oubliée. Un roman poignant qui révèle une vérité brûlante au souffle de la poésie.
Elle fut longtemps appelée « la folle de Saint-Lunaire ». Mais Jeanne Devidal (1908-2008) est aujourd'hui reconnue comme un Facteur Cheval au féminin, avec sa maison-forteresse, faite de bric et de broc, qui finit par s'inscrire sur les circuits touristiques de la côte d'Opale, en Bretagne. Fabienne Juhel dédie ce tombeau littéraire à cette femme en marge, aux nombreuses zones d'ombre, entre folie et art brut, qui fut torturée par les Allemands lors de la Seconde guerre mondiale.
Dans une maison bretonne, entourée d'un immense parc boisé, habitent trois femmes. La narratrice est une enfant rêveuse et menteuse que sa mère abandonne souvent à Teresa, la bonne mexicaine. L'enfant compte pour amis la poupée Nadine qu'elle aime surtout martyriser, Teresa dont elle apprécie les rondeurs et la cuisine gourmande et puis les arbres, auxquels elle est liée presque charnellement. Parmi ces arbres, il y a le grand hêtre, son arbre à rêves, son confident. Elle dont l'esprit fourmille de fables et qui comprend peu à peu qu'elle est une enfant du mensonge, à qui on cache un secret, a noué avec la nature qui l'environne un lien vrai, sincère.
Aussi, quand un bûcheron est engagé pour nettoyer le parc, c'est tout son royaume qui est menacé. Comme elle, il connaît les arbres, mais il les tue. Incapable de rester inerte face au massacre de ses compagnons, gardienne jalouse de son petit temple de femmes, elle va faire de celui qu'elle surnomme "l'Indien" l'ennemi à abattre. Est-elle une sorcière toute-puissante ou une enfant fantasque et innocente, jouet de ses propres illusions ?
Par une oscillation constante entre création et destruction de la poésie, Fabienne Juhel frôle le conte mais ne s'y attarde pas. Ici on parle aux poupées mortes plutôt qu'aux animaux, on découvre la correspondance amoureuse qui unit deux femmes, et les arbres se muent en amants sensuels. Porté par une voix inquiétante et cruelle, ce premier roman aborde le passage à l'âge adulte dans ce qu'il a de plus troublant.
Dans une petite ville en bord d'océan, une famille enterre un homme appelé Julius. Dans la chaleur de l'été, pendant que le cercueil est porté vers le cimetière accroché à la falaise, chaque membre de la famille se souvient de ce bel homme fin et élancé, à la peau noire comme de l'ébène. Il y a le père médecin, la mère galeriste, la grand-mère et les deux enfants. Chacun semble porter la culpabilité de la disparition brutale de Julius, ce qu'ils appellent à mots couverts « un accident ». Qui était donc Julius, qu'ils ont enseveli nu dans un linceul blanc ? De quoi sa mort est-elle le signe ?
On remonte donc en cinq tableaux l'histoire de la rencontre de cette famille avec Julius, et chacun des cinq va donner sa propre vision de l'histoire. Julius a débarqué sur la plage le jour de la grande tempête d'équinoxe et, tout naturellement Marie, la mère, l'a invitée à rester quelques temps chez eux, dans la belle chambre d'amis qui héberge d'ordinaire des artistes en résidence. La vie de chacun va en être bouleversée, non seulement ce qu'on appelle le quotidien des jours, mais bien au-delà. C'est un renversement des perspectives que Julius va opérer chez eux, une ouverture de l'horizon, chez la grand-mère Léonie qui n'attendait plus grand-chose de l'existence, comme chez la petite dernière, Lola qu'on appelle la Simplette, qui tombe amoureuse de ce grand homme mystérieux. Tous, d'une façon ou l'autre, vont « faire l'amour » avec Julius, comme tous, dans le dernier mouvement, vont « tuer Julius ».
Dans cette parabole, Fabienne Juhel a le culot de nous proposer une revisitation très contemporaine du Christ, bien loin des canons orthodoxes, et ce roman allie poésie, pointes d'humour et regard pertinent sur notre époque.
Comme d'ordinaire, chez cette auteure, on se trouve confronté à des personnages aux corps sensuels et aux âmes singulières. Ceci est donc un livre chrétien, mais à sa manière bien particulière, un appel à la vie, ses mystères et ses bouleversements. « Qu'est-ce qu'une histoire ? me demanderez-vous. La narration d'un miracle », écrit Fabienne Juhel.
« Défense de déposer des ordures » : il a suffit de cette mention, en apparence anodine, sur la palissade d'un chantier, pour qu'Antoine jette ses clefs dans la décharge, décide de quitter l'ennui d'une vie de routine auprès de sa femme Maryse et son fils Tony, et de se mette en route pour « aller voir la mer ». Cependant, le roman de Fabienne Juhel n'est pas, loin de là, le récit d'une crise conjugale et existentielle. Car Antoine, que le roman désigne sous le mot « l'homme », comme si ce personnage devait incarner un échantillon de la condition humaine, est le produit d'une histoire complexe, qu'un récit, enchâssé dans l'intrigue générale, va nous dévoiler peu à peu.
Car « l'homme », lorsqu'il était « enfant », a été élevé par un couple étrange, « Les Ténébreux », frère et soeur en réalité, victimes durant leur enfance d'expériences scientifiques nazies, et ayant perdu, dans les camps, leur part d'humanité. Enfant adopté d'origine indienne, Antoine a été élevé sans amour, et instrumentalisé pour accomplir une mission barbare, que l'on devinera peu à peu. Pour purger sa mémoire et son coeur - la lettre d'un cardiologue semble avoir été déterminante dans sa décision de partir -, Antoine va devenir un homme qui marche, et dans sa traversée de la France, de Saint-Malo aux Saintes-Maries-de-la-Mer, fera des rencontres déterminantes, qui vont le réconcilier peu à peu avec son passé et lui-même.
Dans un village sans nom, dissimulé au creux d'une lande sauvage, vit une communauté de vingt-neuf personnes d'un genre spécial : ici la mort a été abolie et chacun des habitants s'est réfugié pour une raison avouable ou pas. Mais des événements inexplicables se succèdent, qui font éclater leur vie éternellement répétitive : un homme est retrouvé mort aux grilles du village, des animaux sont dépecés et crucifiés. La communauté a-t-elle perdu son immunité ? Cache-t-elle en son sein un meurtrier ? Dans son cinquième roman, sorte de polar métaphysique d'une très grande maîtrise, Fabienne Juhel nous tient en haleine et nous livre une belle réflexion sur le sens de la vie. Prix Ouest France/Etonnants voyageurs pour A l'angle du renard, elle donne là un roman à la fois populaire et exigeant.
Après avoir fêté les noces de froment de l'installation de son ami Dominique à Lannion, voilà Léo embarqué avec Suzette, dont la grand-mère brodeuse vient d'être trucidée à coups de crucifix, au pays des Ducs de Rohan.
Quelqu'un cherche à saborder la manifestation artistique qui a pour cadre les petites chapelles du pays.
L'enquête serait facile si Léo n'était pas travaillé par une question lancinante : a-t-il couché avec cette grande gazelle noire de Césaire-Diop, l'invité d'honneur de la manifestation, qui ressemble à son amour disparu ?
depuis toujours, elle s'est perdue.
bébé, ses parents l'oublient dans une fête foraine. fillette, elle s'égare avec plaisir dans les bois. trente ans plus tard, à l'hôpital, on la dit perdue. la tumeur, une étoile accrochée à son cerveau, l'a fait basculer dans un univers d'anges et d'ogres. quelque chose de son enfance lui est revenu. qu'on lui laisse oublier la rentrée des classes. elle est partie cueillir des mûres. c'est son dernier été.