À l’occasion de la parution du Carnet brun, le journal de Richard Wagner, replongeons-nous dans la vie aventureuse et l’œuvre enchanteresse du maître de Bayreuth. Une œuvre qui, pour citer Romain Rolland, “dépasse celle des autres auteurs de son siècle : de la hauteur d’une montagne”
Objet entouré d'un profond mystère pendant près d'un siècle, Le Carnet brun de Richard Wagner n'est publié en allemand qu'en 1975. Cet épais cahier relié de cuir marron fut offert en 1865 par Cosima Liszt von Bülow à son amant lors d'une longue séparation pour qu'il y consigne ses pensées. De journal intime auquel Wagner confesse ses déboires sentimentaux, son contenu prend ensuite la forme d'un carnet de notes traitant des événements de son quotidien - les difficultés rencontrées avec son mécène Louis II de Bavière, la perte de ses amis... -, préparant son autobiographie ou bien accueillant ses réflexions sur Beethoven, des poèmes, la première esquisse en prose pour Parsifal ou des écrits divers sur les sujets musicaux, sociaux ou scientifiques.Pour la première fois, les curieux comme les mélomanes pourront lire, enfin traduite en français, l'intégralité de ces pages qui n'étaient pas destinées à être publiées.
L'existence d'une autobiographie rédigée de façon aussi précise et méticuleuse que Ma Vie est une chance exceptionnelle pour la postérité, qui dispose ainsi d'un document de première main, même si sa fiabilité est parfois sujette à caution. Certes, le récit ne couvre qu'une partie du parcours artistique, politique et intellectuel du compositeur : il commence avec sa naissance à Leipzig en 1813 et s'arrête en 1864, au moment où le roi Louis II de Bavière lui accorde sa protection. Cette autobiographie propose une fresque haute en couleurs, riche en événements et d'une grande précision sur les cinquante premières années de la vie du compositeur ; elle permet d'entrer dans l'intimité de la genèse de son oeuvre, de ses premiers émois amoureux ; de vivre avec lui sa rocambolesque fuite de Riga, ses difficiles séjours à Paris, sa participation à la révolution de 1849 à Dresde et son long exil suisse dans les années 1850.
Pour le public français, la Chanson des Nibelungen évoque à peine plus que de lointaines sagas germaniques peuplées d'elfes évoluant dans de sombres forêts de l'Est de l'Europe ou aux confins légendaires de contrées du Septentrion impossibles à situer sur une carte. Aux adorateurs de Richard Wagner, elle dira forcément un peu plus. Pourtant, le maître de Bayreuth en a largement réinventé la matière. Quant au terme « Nibelungen », de Nebel (brume, brouillard...), il est même intraduisible. Est-ce un domaine, un empire, un peuple ? Peut-être les trois à la fois. Joël Schmidt, conjuguant ses talents d'écrivain et d'historien, nous conte cette fabuleuse histoire à partir des versions des trois manuscrits qui sont parvenus jusqu'à nous, en moyen et haut allemand. Mettant au jour les origines de la Chanson, il démontre comment ces légendes, colportées par des anonymes, ont ensemencé l'imaginaire populaire. Qu'en ont fait les trouvères et les troubadours ? Comment les artistes s'en sont emparé, de Richard Wagner à Fritz Lang ? Qu'en ont fait l'idéologie et la politique ? Une immersion dans un monde merveilleux qui ravira les amateurs de mythologie nordique.
Né en 1903 à Frankfort, Theodor W. Adorno a fait des études de philosophie, de sociologie et de sciences politiques aux universités de Francfort et de Vienne. En composition musicale, il a été l'élève d'Alban Berg. Obligé de quitter l'Allemagne en 1933, il a vécu successivement à Paris, à Oxford, à New York et à Los Angeles. Il a dirigé le service de recherches radiophoniques de l'Université de Princeton. Il revient en 1950 à Francfort, où il occupe deux chaires de philosophie et de sociologie. Il est également l'un des directeurs de l'Institut de recherches sociales de Francfort. Auteur de nombreux ouvrages, on peut dire qu'il a exercé une grande influence sur les jeunes compositeurs de l'après-guerre, aussi bien aux États-Unis qu'en Europe.Dépassant les points de vue de Nietzsche, qui a consacré de nombreuses pages à l'étude comparée des drames wagnériens et des chefs-d'oeuvre classiques, à l'analyse de la composition dans Carmen et Tristan, Theodor W. Adorno entreprend une révision radicale du «cas» Wagner, en utilisant les disciplines les plus variées : la théorie et l'analyse musicales, l'esthétique générale, la philosophie, la sociologie et la psychologie. Ce livre s'adresse donc aussi bien au musicien professionnel qu'au sociologue, au philosophe et à tous les amateurs d'art.
Ce livre rassemble des écrits de Wagner (Beethoven, suivi d'Une communication à mes amis et de Mettre sur la musique) devenus introuvables. Tout d'abord, les textes qu'il a consacrés à Beethoven, le grand intercesseur, entre 1840 et 1870, et publiés en français en 1937, dans une traduction de Jean-Louis Crémieux-Brilhac. Et puis, paru en 1976, traduit et préfacé par Jean Launay, Une communication à mes amis, le texte de présentation de ses trois grands opéras d'avant la Tétralogie : Le Vaisseau fantôme, Tannhäuser et Lohengrin. En 1851, âgé de trente-huit ans, le compositeur y définit sa conception du drame musical, qu'il oppose à l'opéra, à travers le récit de son propre itinéraire et une vision très juste de son avenir musical, notamment de L'anneau du Nibelung. À ces textes s'ajoute enfin l'important Lettre sur la musique, traduit en 1860 par Challemel-Lacour, que Wagner avait connu dans leur exil en Suisse, et qui fut longtemps, en France, l'unique accès aux écrits théoriques de Wagner, écrivain prolifique qui n'a jamais vraiment séparé le théorique de l'autobiographique.
Lors de son premier sejour a Paris, entre 1839 et 1842, Richard Wagner survit en e€ ectuant divers travaux musicaux alimentaires. Il ecrit egalement quatre nouvelles publiees directement en francais dans la Gazette musicale et qui sont ses seules oeuvres litteraires de fi ction. On les trouvera ici rassemblees, ainsi qufune premiere á.Esquisse autobiographique.â, couvrant les trente premieres annees de sa vie.
á. Une visite a Beethoven et Un musicien etranger a Paris sont tout a fait remarquables.: nouvelles dfinspiration ho€ mannienne mais temperee dfun humour et dfune grace qui font penser au celebre Voyage de Mozart a Prague de Morike..â (Marc Soriano)
La walkyrie brünnhilde a désobéi à son père, le dieu wotan : elle a voulu soustraire à sa justice le guerrier siegmund, frère et amant de sieglinde.
Cédant aux exigences de son épouse, l'inflexible fricka, wotan fait tuer siegmund par hunding, le mari de sieglinde, et punit sa fille rebelle. brünnhilde, déchue de sa condition divine, devient une simple mortelle. exilée du walhalla, endormie à l'abri d'un cercle de feu tracé par son père, elle ne s'éveillera qu'à l'appel d'un héros pur et inaccessible à la peur. cet homme sera siedfried, le fils de siegmund et sieglinde.
Après le prologue de l'or du rhin, la walkyrie est la première journée de l'anneau du nibelung.
Ce guide ouvre plusieurs portes d'accès à l'oeuvre de Wagner. Il s'adresse à tous les curieux de l'univers wagnérien, de ses enjeux poétiques et politiques, de ses sources mythiques. Chaque opéra est analysé séparément, et les passionnés du disque et de la mise en scène trouveront un panorama des grands interprètes, chefs et metteurs en scène wagnériens.
Hormis Pygmalion, dans sa version cinématographique My Fair Lady, l'oeuvre de Bernard Shaw est aujourd'hui presque complètement inconnue du public français. Parmi les mélomanes, rares sont ceux qui ont lu le Parfait wagnérien ou qui en connaissent même l'existence ; plus rares encore ceux qui savent que ce célèbre essai était le fruit d'une familiarité professionnelle avec la musique.
C'est en effet comme critique musical, et rapidement l'un des plus talentueux d'Europe, que Shaw est entré dans la carrière journalistique et littéraire. Pendant près d'une vingtaine d'années (de 1876 à 1894), il a tenu avec un brio croissant une chronique musicale régulière dans la presse londonienne ; et même lorsqu'il cessa cette activité, il n'en continua pas moins à publier, de temps à autre, des articles marquants.
Wagner et les interprètes wagnériens de son temps constituant le massif central de ses écrits sur la musique, ceux qui en traitent ont été ici rassemblés. Mais cette anthologie ne devrait pas intéresser seulement les wagnériens. Comme, dans les articles de Shaw, Wagner voisine souvent avec d'autres compositeurs précédents ou contemporains ; et que ses principaux interprètes outre-Manche, tant à l'opéra qu'au concert, venaient principalement de l'étranger et s'illustraient aussi dans d'autres répertoires, c'est une large part de la création et de la vie musicales européennes dans la seconde moitié du XIXe siècle qui s'y trouvent évoquée par un critique d'une indépendance de jugement et d'une verve incomparables.
La grandeur de l'un des plus remarquables musiciens du monde occidental peut-elle excuser des positions parmi les plus abjectes qui soient ? Et surtout : peut-elle justifier qu'on les ignore ?
Leurs manifestations ne font malheureusement aucun doute : dans son essai « La judéité dans la musique » (1850) ou d'autres écrits dont on trouvera ici des traductions nouvelles, ainsi qu'un inédit en français. Mais peut-on dire que les livrets et même la musique de ses opéras sont antisémites ? L'antisémitisme de Wagner est un sujet pour le moins controversé dans la littérature spécialisée dont on trouvera ici un bilan à la fois critique et polémique, mettant en jeu l'enquête biographique, l'histoire générale, l'histoire de l'antisémitisme, l'histoire de la musique, la musicologie, la sémiologie, la psychanalyse et l'esthétique.
Et comment l'expliquer ? Parce qu'il aurait été juif lui-même ? Beaucoup de ses contemporains le croyaient, comme l'atteste la vaste collection de caricatures du compositeur réunie dans cet ouvrage. Au terme d'un examen serré, il est nécessaire de poser des questions dérangeantes : faut-il interdire l'exécution ou la représentation des opéras de Wagner ? Faut-il fermer Bayreuth ?
Ce voyage initiatique en un prologue et quatre journées entrouvre les portes d'un monde unique et toujours fascinant. Un ouvrage idéal pour découvrir Wagner et son oeuvre.
Tout a été dit (et écrit !) sur le compositeur Richard Wagner... L'ambition du livre de Xavier Lacavalerie n'est évidemment pas de tout (re)dire sur ce sujet inépuisable d'étude et de réflexion, mais d'entrouvrir les portes d'un monde unique, toujours aussi fascinant. C'est donc un voyage initiatique, en un prologue et quatre journées, que nous propose l'auteur. Un parcours pour replacer la musique de Wagner dans son contexte créatif et historique, afin d'en mieux percer la portée et les enjeux. Bref, le livre idéal pour découvrir Wagner et son oeuvre. Comme tous les volumes de la collection "Classica", ce Wagner est enrichi d'une bibliographie, d'une discographie et d'un index.
La parution de l'Encyclopédie Wagner se situe dans le prolongement de l'exposition consacrée à ce compositeur à la Cité de la musique à l'automne 2007. Il s'agira d'un très gros dictionnaire, riche d'environ six millions de signes, qui traitera de tous les aspects du phénomène Wagner,de l'homme, de ses oeuvres et de leur réception, de ses écrits, du contexte de création, des artistes influencés, des interprètes et exégètes... Près de mille quatre cent entrées sont prévues, ainsi que différentes annexes, notamment des cartes, cette encyclopédie sera publiée en un volume relié.
A l'origine de ce projet, un triple constat : l'intérêt toujours aussi aigu et même renouvelé pour Wagner et pour son oeuvre, l'engouement toujours plus large du public - et même du grand public - pour la musique classique ainsi que pour les objets culturels qui permettent de la décrypter. Aucun compositeur, en effet, n'a suscité autant d'engouement ni autant de réticences que Wagner. Aucun n'a su produire une telle vision du monde (qu'elle soit contestable ou non, elle parcourt tous les pans de l'être-au-monde : une esthétique, une politique, une philosophie, etc., qui se donnent à lire, à voir et à entendre dans une oeuvre théorique volumineuse, et une création artistique au génie ample et intimidant), ni exercé une telle influence ou suscité de tels accaparements. C'est un phénomène tout à fait incomparable parmi les musiciens occidentaux, et auquel, depuis un siècle et demi, il est donné le nom de «wagnérisme».A la vocation totalisante de l'homme et de l'artiste (dont la fameuse «oeuvre d'art totale» et le festival de Bayreuth sont les symboles achevés), aux retombées multiples, contradictoires et problématiques, dans l'histoire culturelle européenne, de cette figure qui, selon Nietzsche, «résume à [elle] seul[e] la modernité», se devait de répondre un ouvrage qui soit à la hauteur des enjeux - c'est-à-dire lui-même traversé par un désir de totalité, synthétique et exhaustif : rien moins qu'une encyclopédie. Le présent ouvrage, dont la parution se situe dans le prolongement de l'exposition «Wagner, visions d'artistes» qui s'est tenue à la Cité de la Musique de Paris en octobre 2007, réunit une quarantaine des plus grands spécialistes francophones de l'oeuvre wagnérienne. Les éditions Actes Sud ont donné aux collaborateurs de ce projet les moyens nécessaires à la meilleure réalisation d'une telle entreprise : six millions de signes, mille quatre cents entrées (des entrées synthétiques allant de un à vingt feuillets et abordant les sujets les plus divers ; des entrées monographiques consacrées à telle ou telle oeuvre, telle ou telle figure).
En 1859, Franz Liszt voulait publier à Paris un livre sur les opéras de Richard Wagner, ce qui aurait été le premier ouvrage de la sorte de l'histoire. Malheureusement, ce livre ne fut jamais édité. C'est seulement en 2006 que réap¬parut à Yale un manuscrit, longtemps considéré comme perdu, permettant d'apprendre l'existence de ce projet et de le réaliser, après de longues investigations en Europe et aux États-Unis.
Dans les textes de Liszt, on découvre à la fois une analyse poétique des livrets et une analyse musicale, qui ne devient jamais trop technique. Alors que l'historiographie wagnérienne est encore vierge, Liszt décrit notamment le procédé de déclamation vocale, la conception continue du drame, le lien entre livret et musique, et même les leitmotivs, qu'il nomme avec beaucoup de finesse des "phrases artères" donnant vie et mouvement au drame en son entier. Témoin historique, le texte de Liszt est également profondément d'actualité.
Quatre scènes composent ce livre, toutes consacrées à Wagner. Les deux premières (Baudelaire, Mallarmé), contemporaines du triomphe européen du wagnérisme, s'inscrivent dans une séquence historique que ponctuent la guerre de 70 et la Commune, où se préfigure le déchaînement mondial des nations et des classes. Les secondes (Heidegger, Adorno) ont lieu lorsque certains aspects du wagnérisme se sont fait sentir et que la confusion du « national » et du « social » s'est comme solidifiée dans une configuration politique monstrueusement inédite. Dans les deux cas se jouent, ensemble, l'art et la politique, mais ni sous la forme d'une politique de l'art, ni encore moins, sous celle d'un art de la politique. Il s'agit, plus gravement, de l'esthétisation - de la figuration - du politique. Ces quatre scènes encadrent et éclairent « la vraie scène », événement philosophique majeur, qui sanctionna la rupture de Nietzsche avec Wagner.
Thomas Mann
Sang réservé
suivi de Désordre
Romancier à grand souffle des Buddenbrook et de La Montagne magique, Thomas Mann n'a cessé en même temps d'être fasciné par l'art de la nouvelle, fait d'intensité et de concision. En témoignent ces textes écrits à divers moments de sa vie, et qui révèlent un aspect particulier de son génie d'écrivain.
La passion sensuelle qui conduit un frère et une soeur à outrepasser le tabou de l'inceste ; un chagrin d'amour enfantin, dans l'Allemagne chaotique et déboussolée des années 1920 : en traitant avec une telle subtilité des thèmes et des ambiances très différents, Thomas Mann nous impressionne par la rigueur et la force de son écriture, la lucidité et l'humanité de son regard.
Rédigée au début du XIII? siècle par l'éminent historien islandais Snorri Sturluson, l'Edda constitue le recueil de mythologie nordique le plus complet que nous ait légué le Moyen Âge scandinave. Au cours de récits souvent hauts en couleur, l'auteur retrace tout d'abord la création de l'univers à l'origine des temps, avec notamment l'épisode du démembrement d'Ymir, le géant primitif ; puis il présente les principaux dieux de l'antiquité païenne et raconte leurs exploits, leurs aventures et leurs querelles, tandis qu'à l'arrière-plan se profile de plus en plus nettement le drame du monde, le fameux Crépuscule des dieux, dont la description particulièrement saisissante constitue le point d'orgue de l'ouvrage.Bien qu'il ait été conçu plus de deux siècles après la conversion offcielle de l'Islande au christianisme, ce traité témoigne d'une intime connaissance des poèmes mythologiques composés à l'époque païenne tant en Norvège que dans l'île des sagas. À ce titre, l'Edda offre un intérêt capital pour l'étude de l'ancienne religion scandinave, de même que pour les enquêtes de mythologie comparée indo-européenne.Cette nouvelle traduction repose sur un examen approfondi de la tradition manuscrite de l'oeuvre, en sorte qu'à la différence des traductions précédentes, elle tient largement compte des principales variantes fournies par les manuscrits de l'Edda.
Il a édifié des châteaux fantastiques exaltant l'éthique de la chevalerie médiévale et le génie de la France du Grand Siècle. Il a sauvé de la faillite Richard Wagner, imposant son oeuvre mais contraint d'exiler le musicien au comportement intéressé. Il a été le premier mécène du festival de Bayreuth. Son homosexualité le révulsait et défrayait la chronique. Il fut cependant l'étrange confident de sa belle cousine, la célèbre Sissi, impératrice d'Autriche et reine de Hongrie. Il s'est battu pour défendre l'identité de son royaume, dans l'Empire allemand. Accablé par l'effondrement français en 1870, il se réfugia dans ses montagnes, construisant de fascinants palais et s'isolant dans un monde que personne ne pourrait atteindre ni détruire. Il est mort sur le rivage d'un lac, dans des circonstances énigmatiques. Accident ? Suicide ? Assassinat ? Louis II n'est pas seulement le plus célèbre des rois de Bavière, il est aussi le plus mystérieux. Grâce à une enquête minutieuse dans les archives et les dossiers de son règne, Jean des Cars réussit à expliquer la vie et la mort de ce monarque visionnaire, longtemps victime d'une réputation injustifiée parce qu'il percevait parfaitement les pulsions de son siècle.
Siegmund est un jeune homme prolongé (il va avoir quarante ans), un homme raté. Il se trouve entre deux femmes, pris dans une impasse dont il ne sortira pas. Véra, qu'il a épousée trop jeune et qui lui a donné deux enfants, est une bourgeoise, aigrie par une vie médiocre qu'elle lui reproche. Siegmund en effet est artiste et musicien : il vit et fait vivre sa famille, tant bien que mal, attaché comme violoniste à une grande association symphonique de Londres. Ce foyer n'est pour lui qu'une lourde chaîne qu'il ne saura pas rompre et qui finira par l'écraser. Hélène est une jeune fille forte et fière, sensuelle mais pure, c'est une walkyrie. Elle aime passionnément Siegmund. Siegmund l'aime, mais il est faible, il ne l'a jamais possédée, - il n'y parviendra pas même au cours d'un long duo, qui forme le centre du livre, dans l'île de Wright où ils ont fui ensemble. Siegmund rentre à Londres vaincu et se pend dans sa chambre. L'atmosphère du livre est toute musicale et singulièrement wagnérienne. Sur un rythme lent et déchirant à la fois, les thèmes de l'amour, de la mer, de la fatalité, de la mort naissent successivement, se développent, s'enchevêtrent pour aboutir au sombre but : la mort de Siegmund. Cet ouvrage qui a paru en Angleterre en 1913, est sans doute un des plus beaux romans de D. H. Lawrence, et peut-être le plus émouvant.
Qu'exige un philosophe, en premier et dernier lieu, de lui-même ? De triompher en lui-même de son temps, de se faire «intemporel». Sa plus rude joute, contre quoi lui faut-il la livrer ? Contre tout ce qui fait de lui un enfant de son siècle. Fort bien ! Je suis, tout autant que Wagner, un enfant de ce siècle, je veux dire un décadent, avec cette seule différence que, moi, je l'ai compris, j'y ai résisté de toutes mes forces. Le philosophe, en moi, y résistait.Ma préoccupation la plus intime a toujours été, en fait, le problème de la décadence, - et j'ai eu, à cela, mes raisons. [...] Si l'on s'est exercé la vue à déceler les signes du déclin, on comprend aussi la morale, - on comprend ce qui se dissimule sous les plus sacrés de ses noms et de ses formules de valeur : la vie appauvrie, le vouloir-mourir, la grande lassitude. La morale dit non à la vie. Pour entreprendre une telle tâche, il me fallait de toute nécessité m'imposer une dure discipline : prendre parti contre tout ce qu'il y avait en moi de malade, y compris Wagner, y compris Schopenhauer, y compris tous les modernes sentiments d'«humanité»...Friedrich Nietzsche.
« Tristan et Iseut. L'ennui tombe, à peine leurs deux noms prononcés. Ils s'aiment, c'est entendu. Qu'en dire de plus ? Comment Tristan et Iseut ont-ils fait pour ne pas s'ennuyer et pour traverser les siècles avec leur amour idéal, brûlant, intact ? Comment sont-ils restés un modèle de l'amour depuis le Moyen Âge ? C'est qu'ils ne le sont pas restés. Ils le sont devenus. Tels que nous les connaissons, ils sont une invention du XIXe siècle. ».
Que nous disent Tristan et Iseut aujourd'hui ? Michel Zink cherche une réponse en suivant les sinuosités de la légende médiévale, les interrogations, le trouble, les réticences, les enthousiasmes qu'elle a suscités à l'époque même. Tristan et Iseut s'aiment à la vie, à la mort. Ils incarnent la passion amoureuse à l'état pur. Mais qu'est-ce donc que cet amour de deux drogués, qui ont bu par erreur un breuvage que les poèmes médiévaux appellent un « poison » ? Cet amour qui saccage devoirs et fidélités ? Ces amants rusés, sournois, parfois cruels ?
Fasciné, séduit et effrayé par eux, le Moyen Âge s'interroge. Nous aussi. Nos premiers romans, au XIIe siècle, nous font entrer dans une ère du soupçon qui est plus que jamais la nôtre.